Hope

L os Angeles, tournant des années 50, Joey Fabrizzi, l’enfant star est porté disparu. Le père du gamin sollicite les services d’un privé, Mallory Hope. Et s’épanche rapidement auprès l’enquêteur. Il raconte que sa réussite, il la doit à son môme. Un petit gars à part qui possède un don paranormal. Une sorte de pouvoir surnaturel. Quelque chose de pas très catholique que pourtant l’armée américaine a mis en œuvre pendant la guerre. Aussi fantasque que cela puisse paraître, le vieux limier a des souvenirs similaires. Maxillaires serrés, il accepte le contrat. Mais sa mémoire commence à lui jouer des tours. C’est qu’il y a plusieurs années, des ravisseurs ont dérobé son fiston. C’était à New-York. Si seulement, il pouvait y avoir un lien entre les deux affaires !

Hope est une création originale estampillée 2000 AD, publiée dans les numéros 2011 à 2016 et 2044 à 2049 du périodique anglais. Traduit par la maison Delcourt, le titre s’insère au sein de la collection Contrebande de l’éditeur. Aux commandes de l’opus, le scénariste Guy Adams et l’illustrateur Jimmy Broxton (The Unwritten, Batman Knight and Squire) proposent un récit policier au postulat original. Dès l’entrée en matière, le personnage principal s’adresse aux lecteurs et lui dévoile l’impensable. La magie existe et l’utiliser nécessite d’en payer le prix. Preuve en est, Franklin Delano Roosevelt. Qui peut croire que le Président est mort d’une crise cardiaque, le 12 avril 1945 ?

« C’est lui qui a allumé la mèche de ce qui nous a pété à la gueule et il l’a payé de sa vie et de son âme ».

Cependant, une fois la révélation sortie de son chapeau, l’écrivain délivre un récit maîtrisé et somme toute assez banal où la puissance graphique du dessinateur prend le pas sur les rebondissements de l’intrigue. Son antihéros, moins sensible aux sciences occultes que John Constantine, peine à faire décoller ses investigations. Sa recherche d’indices s’avère d’une difficulté insondable. Ses interrogatoires se révèlent unanimement inefficaces. Il est brinquebalé d’anonymes en célébrités et d’agents en malfrats. Contraint d’user des mathématiques obscures, le détective est hanté par une créature inquiétante. Au point qu’au fil des pages, les mystères s’épaississent et les ténèbres s’installent dans le cœur des protagonistes.

Au pinceau, Jimmy Broxton assure une mise en images de qualité. Ses planches sont denses et son trait est ferme. Les événements prenant leur essor dans la cité des Anges, les arrière-boutiques débordent de starlettes paumées, les mafiosi ambitieux déambulent aux bras de femmes fatales et l’initié aux arts ésotériques traîne péniblement sa carcasse, sa barbe de trois jours et son paquet de clopes écrasées. Le tout offre des vrais plans de cinéma agrémentés d’un décorum jamais délaissé. La narration se repose beaucoup sur l’atmosphère sombre qui se dégage des représentations de l’artiste et de l’absence de colorisation. Le noir oppresse et le lavis gris informatique ajoute un effet de saturation. Par moments, le blanc du papier est valorisé. Des séquences éblouissent alors par leur luminosité. Un jeu nécessaire pour mieux s’enfoncer, par la suite, dans les tréfonds de la psyché humaine.

Présentant un cousinage évident avec les œuvres de James Ellroy, Hope tient sa promesse de polar poisseux. Les dialogues sont tranchants, le héros est torturé, l’énigme est tortueuse. Bref, le roman de gare de l’été !

Moyenne des chroniqueurs
7.0