Planeta extra

L e métier de Kiké et Tito ? Déménageurs. Leurs clients sont surtout de riches terriens qui souhaitent quitter la planète
- devenue un bidonville géant - pour s'installer sur Luna Europa, «the place to be». En ce jour bien pollué, première mauvaise nouvelle : les taxes au cosmoport ont augmenté ; deuxième : la fille de Kiké veut, elle aussi, s'envoler pour le nouvel éden avec son mari, trop aimable pour être honnête. Mais un papa est prêt à tout pour protéger son enfant, non ?

Comme dans La bulle de Bertold, Diego Agrimbau expose une critique de la société et de l'humanité au travers d'une dystopie décalée, en moins burlesque et beaucoup plus réaliste, pour le coup. Cet avenir est certes fantasmé, cependant, loin d'être absurde, il entrevoit les conséquences d'une continuité dans nos travers et dans comportements abusifs. En exposant les déboires d'un père «mère-poule» en butte contre le système, le scénariste montre que l'humain n'abandonnera jamais ces défauts et que la corruption, les magouilles et le pouvoir sont toujours maîtres. Fable intelligente, décomplexée et pertinente, ce récit se lit avec un réel plaisir grâce à une narration enlevée et bien rythmée, mélangeant histoire familiale et critique visionnaire, sans oublier une pointe d'humour grâce aux personnages bien campés et attachants.

Gabriel Ippóliti participe grandement à la réussite de cet album par son style semi-caricatural expressif. Le travail des couleurs est excellent grâce au lavis riche en texture ; la densité de l'air saturé en est presque palpable. Si le découpage reste classique, les cadrages assurent un excellent dynamisme.

Le futur, c'est déjà maintenant. Avec Planeta extra, le duo d'auteurs argentins simulent avec brio, acuité et légèreté ce qui attend l'Homme ou, tout du moins, cela y ressemble grandement.

Moyenne des chroniqueurs
7.0