Renaissance (Duval/Emem) 2. Interzone

2084, les hommes n’ont toujours rien compris. La Terre se meurt et tout ce qui vit dessus aussi ; l’espérance de survie de la race humaine se calcule maintenant en décennies. Chance ou malchance, en quelques jours une fédération extraterrestre a, presque pacifiquement, pris le contrôle des lieux. Elle a éteint les feux de puits de pétrole, puis construit des logis pour ceux qui n’en avaient plus. Si les émissaires de Näkän se montrent altruistes, des partenaires plus opportunistes, par exemple les Torghons et les Skuälls, souhaitent obtenir des compensations en exploitant certaines richesses dont, paraît-il, les habitants de la planète bleue n’ont pas besoin. Pendant ce temps, tous sont un peu dépassés par les événements et, pour tout dire, s’accommodent de cet envahisseur qui apporte des technologies, des soins médicaux et surtout de l’espoir.

Le scénario, signé Fred Duval, est globalement intéressant. Sa vision d’un monde mis à mal par la cupidité des uns et l’insouciance des autres se révèle convaincante. La joute politique qui se tient à l’autre bout de l’univers l’est également ; le lecteur se demande d’ailleurs où se cachent les élus qui ne semblent pas avoir voix au chapitre. Le récit a en effet la particularité d’être présenté du point de vue des extraterrestres. Les Terriens sont décrits comme des entités pataudes qui devraient témoigner leur reconnaissance envers leurs sauveurs, faisant en cela penser aux interventions d’ONG en zones de guerre ou de catastrophe. Le rythme est à la fois rapide et posé. Les deux premiers tomes couvrent à peine une semaine, c’est toutefois suffisant pour remettre l’humanité sur ses rails. Les explications sur les tenants et aboutissants de l’invasion tranquille occupant beaucoup de place, le déroulement apparaît lent. Les intrigues s’entremêlent et il est difficile de deviner laquelle va se démarquer et conduire à un dénouement satisfaisant dans l’ultime volet de la trilogie.

Le dessin d’Emem est dans l’ensemble bien fait, particulièrement les décors. L’artiste dépeint habilement la campagne, les villes en ruine et les cités de l’espace ; ses personnages humains manquent cependant de caractère et le bédéphile apprécierait plus d’intensité dans leur jeu. La colorisation ne remplit pas ses promesses. Le travail est de toute évidence réalisé à la tablette graphique et il s’en dégage une certaine froideur. Lorsqu’il illustre la Terre et ses locataires, le manque de naturel de la mise en couleur s’avère manifeste.

Le troublant pressentiment d’une civilisation courant à sa perte et qui ne s’en sortira qu’au prix d’un miracle venu du ciel.

Moyenne des chroniqueurs
6.7