Berlin sera notre tombeau 1. Neukölln

« C’est notre dernière aube, les gars… »
Ils se nomment de Varennes, Royer, Meunier ou encore Berthier. Que de bons Français ; à un détail près, ils appartiennent à la division Der SS Charlemagne. En avril 1945, en route pour le front, ils s’arrêtent dans un Berlin où les troupes soviétiques sèment la terreur. Ils savent qu’ils ont perdu la guerre ; ouvertement collaborateurs, ils feront bientôt face au peloton d’exécution. Ils continuent tout de même de se battre. Leur objectif n’est plus de défendre le troisième Reich, mais plutôt de freiner l’avancée de l’URSS et d’ainsi donner la chance aux Anglais et aux Américains d’arriver.

Dans Neukölin, tome initial de Berlin sera notre tombeau, Michel Koeniguer met en lumière un aspect fascinant de la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Le lecteur voit les jeunes militaires, les écoute raconter leur histoire et témoigner de leur loyauté. Il entend leurs mauvais calculs politiques et comprend qu’ils persistent, à leur façon, à être dévoués à leur patrie. Pour tout dire, ils se montrent pratiquement sympathiques. Ils ne demandent pas l’absolution, ils ne prétendent pas laver leur honneur, ils cherchent simplement à faire ce qui leur semble le mieux pour leur pays. Et quand ils subissent les assauts ennemis, pénètrent en tremblant dans un immeuble ou consolent un ami en train de mourir, le bédéphile est avec eux.

Portant également la casquette du dessinateur, l’auteur propose un graphisme hyperréaliste. Sa restitution de la ville en ruine et méconnaissable se révèle saisissante. Les personnages sont eux aussi bien rendus, mais comme ils sont nombreux, il est possible de s’y perdre. Les multiples scènes d’action sont représentées avec le souci du témoignage pictural, notamment à l’aide d’un découpage nerveux, mélangeant gros plans et vues d’ensemble. Travaillant souvent sur cinq bandes, l'illustrateur multiplie les vignettes horizontales provoquant ainsi un intéressant effet de claustration.

La première édition dévoile quelques pages du tome 2, Panzer alarm !, avant sa mise en couleur. Ces illustrations permettent de mesurer toute la qualité du travail de Fabien Alquier. Ce dernier a particulièrement soigné les ombres qui accentuent la crédibilité de l’entreprise, notamment lors des séquences nocturnes. Un léger bémol, les explosions présentées sous la forme d’éclats jaunes apparaissent artificielles.

Un récit profondément humain qui rappelle qu’entre le noir et le blanc, il y a une infinité de teintes de gris.

Moyenne des chroniqueurs
7.0