Nevada (Duval/Pécau/Wilson) 1. L'étoile solitaire

M ac Nabb, alias «L'étoile solitaire», s'est fait la malle ! La vedette montante du cinéma américain a disparu en plein tournage. Son absence pourrait être lourde de conséquences, car si Louise Hathaway, la productrice, ne retrouve pas sa star dans les meilleurs délais, c'est son film qui risque de ne jamais voir le jour et son portefeuille délesté d'une grosse liasse de dollars. Pas d'autres alternatives pour elle que de s'attacher les services de Nevada Marquez, un cow-boy chevauchant une Harley, pour ramener la vedette illico presto sous les feux de la rampe.

Après Moriarty et Jour J, Fred Duval et Jean-Pierre Pécau s'associent à nouveau pour le scénario d'un western dont ils situent l'action au sud des États-Unis au début du vingtième siècle. À des miles des standards qu'ils avaient l'un et l'autre publiés (Gibier de potence en 2001, Wayne Redlake en 1995 et plus récemment Sonora), ils opèrent un changement de décor radical. Les conflits avec les Peaux-rouges, la ruée vers l'or et la guerre de Sécession ne sont plus que de lointains souvenirs et laissent place, entre autres, aux années folles et à la naissance des studios hollywoodiens. Au milieu de cette émergence d'anarchie et des vices sous toutes leurs formes, le tandem installe un héros qui se veut charismatique, anticonformiste, et qui rappellera aux plus férus son homonyme sorti naguère en «petit format», faisant le succès des Éditions Lug. Venons-en à l'intrigue : classique, elle ne casse pas cinq pattes à un canasson en dévoilant un individu fantasque et insouciant aux prises avec une cohorte de bandidos mexicains, et qui ne devra son salut que grâce au courage d'un mercenaire. Néanmoins, la singularité du personnage central, flanqué d'une bécane légendaire, réussit à susciter un vif intérêt.

Avec un biker en relief abandonnant dans sa trace une mesa majestueuse, identique à celles qui se dressent dans la Monument Valley, la couverture de l'album est une friandise pour la rétine, évoquant à elle seule une affiche du septième Art. Colin Wilson, déjà a son avantage sur le dessin de la jeunesse de Blueberry, offre largement de quoi satisfaire les pistoleros les plus exigeants. Les superpositions de cases, les cadrages variés sur les gringos et leurs visages rendus poussiéreux par les terres orange et les haciendas brinquebalantes posées sur des paysages arides et secs empêchent le lecteur de tomber dans une routine visuelle.

Malgré un épilogue qui se devine et se voit aussi gros qu'un colt pendouillant à un ceinturon, L'étoile solitaire présente d'autres arguments appréciables pour, au final, constituer un assez bon premier périple.

Moyenne des chroniqueurs
6.0