Amer béton Amer Béton

C es petits «chats» sont loin de ronronner et ne se laissent pas facilement caresser… Noiro et Blanko règnent sur Takara, une ville qu'ils aiment mais qui est en train de les trahir. Les deux gamins se soutiennent, tiennent en joue et se jouent des gangs et de la police. Mais le Rat, un yakuza, est revenu dans le quartier. Il n'y aura pas de place pour tous : la guerre est déclarée !

Après une première intégrale sortie en 2007, qu'en est-il de cette réédition, douze ans après ? À l'origine en trois volumes chez Tonkam, l'œuvre n'a pas pris une ride et conserve une portée universelle indéniable. Taiyou Matsumoto fait partie de ces auteurs à part, intelligents, sensibles et ayant un regard sur la vie qui transparaît au travers de leurs œuvres d'une manière beaucoup plus subtile qu'il n’apparaît, sonnant terriblement juste.

Cet artiste, qui ne fait pas comme les autres, possède un style très éloigné du manga habituel : son dessin surprend et séduit grâce à son caractère particulier qui n'a pas de prise au temps. Les perspectives étranges tanguent, donnant une impression irréaliste, accentuée en cela par l'omniprésence du symbolisme et de la métaphore. Pas de dégradé, mais trois tons, blanc, noir et gris pour intensifier le contraste et conforter la dureté du récit. Le découpage génial allie classique et innovation avec des constructions éclatées, à l'image d'un miroir brisé. Coté scénario, l'histoire parait simple et sombre : un duo d'enfants inséparables et opposés en tout, qui luttent pour survivre en un monde violent et sans pitié. Une sorte de combat entre David et Goliath dans une arène urbaine, presque vivante et autour de laquelle gravite tout un échantillon de l'humanité. L'écriture est puissante, certains dialogues résonnent et restent dans l'esprit du lecteur.

Inclassable, intemporel et universel, Amer béton se révèle un ouvrage indispensable pour les amateurs de profondeur et d'originalité. À (re)découvrir d'urgence.

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