U.C.C. Dolores 1. La Trace des nouveaux pionniers

P our Mony, 18 ans, il est temps aujourd'hui de quitter l'Ordre des nouveaux pionniers qui l'avait recueillie alors qu'elle n'était qu'un nourrisson. Comme un oiseau à qui on ouvre la porte de sa cage, la voilà qui fait face à un monde dont elle ignore tout, avec pour seul héritage, l'UCC Dolorès, un croiseur de guerre de l'armée ayant appartenu au très controversé général Mc Monroe. La belle affaire, merci pour le cadeau ! Dorénavant, elle n'aura pas d'autre choix que de s'attacher les services de Kash, un revanchard un peu grognon, tout en biscottos rencontré par hasard, pour piloter un engin pareil et les emmener tous deux vers un nouveau départ.

Taquin ce Tarquin ! «Par crainte de s'enliser dans une situation confortable» comme il l'avoue, et de tomber dans une routine qui pourrait chloroformer ses ardeurs troyennes, l'un des papas de Lanfeust s'éloigne momentanément de la maison Soleil, mettant ainsi de côté toute sa petite tribu, pour tenter une nouvelle expérience chez le voisin Glénat. Un pari et une remise en question à travers un premier projet solo mûrement réfléchi et qui lui ressemble. Analyse et exploration de son nouvel univers.

Avec La trace des nouveaux pionniers, acte un d'une nouvelle trilogie de science-fiction intergalactique, proche et en même temps à des années-lumière de Lanfeust des étoiles, Didier Tarquin poursuit dans son domaine de prédilection. Qu'on se le dise, il ne s'agit pas pour autant d'un ouvrage-clone, car même si le thème semble similaire et que les ingrédients-phares restent à peu de chose près identiques, plusieurs points importants diffèrent : il y a d'abord une intrigue robuste autour de la quête d'identité qui tient la route ou en l'occurrence, la galaxie. Quant au tandem improbable, composé d'une grosse brute épaisse à qui l'auteur a ajouté un brin de jugeote, associée à une jouvencelle inexpérimentée, frêle, crédule mais néanmoins déterminée, il va être amené, sans réelle surprise, à faire de bonnes comme de mauvaises rencontres. En définitive, et malgré le fait qu'il ne dynamite pas le genre, le récit reste séduisant et réellement accrocheur. Pas le temps de souffler que les dernières planches arrivent, pour preuve d'un rythme soutenu ; car la grande expérience du scénariste parle et se ressent aussi bien au sein d'un story-board et d'une narration maîtrisés que dans son graphisme, lequel apparaît plus appliqué et plus abouti que dans la plupart de ses ouvrages précédents.

Lyse Tarquin épaule son scénariste et dessinateur de mari dans chacune des étapes de l'album. Mieux, elle s'illustre aux couleurs avec des ambiances et des fonds de planches qui alternent le vert, le rouge, puis le bleu, et sur lesquels se heurtent des décors radicalement différents : des îlots-villes futuristes déconcertants, l'espace et son côté angoissant, ainsi que des contrées verdoyantes à l'image des îles Tenerif, à la fois accueillantes et hostiles. Mis en relief par des teintes appropriées et particulièrement séduisantes, ces milieux riches et variés parviennent à rompre avec la monotonie de certains arrière-plans trop souvent vus auparavant. L'œil du lecteur ne pourra que s'en délecter.

Les passagers qui avaient apprécié les voyages en compagnie de Lanfeust des étoiles, Kookaburra ou encore Sillage pourront prendre place dans la carlingue et les sièges-baquets de l'Unité Corsaire Cosmo Dolorès sans craindre d'éventuelles turbulences. Plaisir et dépaysement garantis !