Babylon Berlin

M uté disciplinaire de Cologne jusqu'au service des mœurs de Berlin, le jeune commissaire Gereon Rath ne rêve que d'une chose : gravir les échelons pour intégrer la prestigieuse brigade criminelle d'Ernst Gennat. Mais en cette période de l'entre-deux-guerres, l'Allemagne, qui baigne dans la corruption, les trafics et les scandales en tous genres, il n'est pas simple de tirer son épingle du jeu. Pour s'imposer, il devra d'abord veiller à son intégrité avant de penser à résoudre à lui seul une sale affaire liée au monde de la nuit.

Dans les années 1920, Berlin, avec ses quartiers interlopes et chics ou ses nombreuses trépidations, a souvent été comparée à Babylone, la ville antique de Mésopotamie, et dont la Bible a fait d'elle le symbole de la décadence et de l'avilissement. Arne Jysch adapte en bande dessinée les romans éponymes de Volker Kutscher, dont le premier tome qui s'intitule Le poisson mouillé a été publié en 2007. Son œuvre a également été relayée par le petit écran sous la forme d'une série produite par l'incontournable Netflix. En découvrant l'ouvrage, le lecteur est immédiatement parachuté dans un pays qui vient tout juste de ranger ses casques à pointes du premier conflit mondial. Une fois poussée l'imposante «lourde» de la Préfecture de police surnommée «château rouge», il y fait aussi, et surtout, la connaissance d'une maréchaussée borderline voire corrompue, et qui se doit de manger dans la gamelle si elle souhaite «serrer» les gros bonnets. Encore faut-il qu'elle le veuille vraiment puisque la politique, les enjeux financiers et les ambitions des uns et des autres viennent enrayer une enquête prenante, bien cadencée, parfois complexe, sur un homicide dont il est par moment difficile de ne pas perdre le fil conducteur.

À l'heure où les phonographes braillent du charleston à tue-tête, où les plumes et les bibis sont les accessoires privilégiés des dames, il ne fallait pas autre chose que du noir, du blanc et leurs dérivés pour faire revivre au plus juste le contexte des années folles. Le graphisme réalisé par le scénariste himself, parvient à sublimer les décors, les costumes d'époque et les moyens de locomotion. Tout aussi agréable, sinon plus, la narration au singulier dans la peau de l'enquêteur est retranscrite par un style d'écriture semblable aux caractères d'une ancienne machine à écrire, contribuant ainsi grandement à cette immersion.

One-shot attractif à plus d'un titre, Babylon Berlin conviendra aussi à ceux et celles qui voudront se pencher sur l'origine du nazisme et son irrémédiable montée en puissance.

Moyenne des chroniqueurs
6.0