La bête Humaine (Dobbs/Giorgiani) La Bête Humaine

F in du dix-neuvième siècle, Madame rentre à l'appartement après quelques emplettes. Son mari, sous-chef de gare, s'étonne de son refus à aller passer quelques jours chez son parrain pour le remercier en personne, dans sa propriété cossue. Après l'avoir poussée dans ses derniers retranchements, il comprend que sa femme a été abusée par son protecteur alors qu'elle était adolescente. La jalousie l'envahissant, il ne peut supporter l'idée du vieil homme touchant son épouse et décide d'assouvir sa vengeance. Il impose à Séverine de l'aider à réaliser son projet dans un train à pleine vitesse. Néanmoins ce soir-là, il y a un témoin du crime, Jacques Lantier, un jeune mécanicien à l'esprit perturbé...

Habitué des adaptations d'œuvres classiques (H.G. Wells notamment et tout récemment Les enquêtes de Nicolas Le Floch), Dobbs choisit cette fois le dix-septième volume des Rougon-Macquartd'Émile Zola, le plus sombre. Du fait de l'absence de contexte intégrant ce récit dans l'ensemble plus vaste de la saga, un rappel du passé du personnage principal et de ses relations aurait été pertinent pour mieux comprendre sa personnalité troublée et sa part d'ombres. De plus, l'histoire ne contient pas qu'un seul héros, chaque protagoniste, de même que le milieu ferroviaire, constitue un rouage dans la mécanique du scénario. Malgré cela, leur développement est inégal. Le lecteur éprouve alors peu d'empathie pour eux car ils n'apparaissent pas particulièrement sympathiques. Le scénariste a fait le choix de mettre en avant le côté thriller : s'il le fait de manière tout à fait satisfaisante, cela est néanmoins au détriment de la dimension psychologique et de la critique sociale du roman. Les défauts humains comme l'envie, la jalousie, la bassesse et la manipulation sont certes abordés toutefois, ils apparaissent un peu poussifs à cause de ce manque de profondeur.

Germano Giorgiani possède un dessin assez nerveux et brut qui, associé aux couleurs passées d'Isabelle Lebeau restituent une ambiance fiévreuse et pesante. L'expressivité qui déforme les visages, ainsi que la froideur des décors industriels, sont bien retranscrits. La monochromie combinée au découpage serré renforce le sentiment d'oppression et de violence latente.

Dans son ensemble, la trame originale est respectée donc, ceux qui auront lu «La bête humaine» ne seront pas perdus. Pour les béotiens, mieux vaut prendre le temps de situer le cadre avec quelques recherches, sinon, ils apprécieront un récit de suspense bien construit dans une époque et un milieu intéressants, bien qu'ayant perdu la puissance critique de Zola.

Moyenne des chroniqueurs
6.0