Mozart à Paris

1778, Mozart débarque à Paris. L’enfant prodige y a connu le succès une dizaine d’années plus tôt. Devenu adulte, il s’y rend pour goûter la gloire. Le musicien est toujours brillant, il n’a cependant pas les habiletés sociales pour s’illustrer auprès des puissants, nobles, bourgeois et autres représentants du clergé. Il souhaite écrire un opéra, mais donne plutôt des cours de piano et compose des petits morceaux presque gratuitement alors qu’il ne mange pas à sa faim et que sa mère se meurt. Pour tout dire, l’intransigeant a du mal à se résoudre à adapter sa musique au « gusto » français.

Frantz Duchazeau a choisi de se concentrer sur une période déterminante, professionnellement et personnellement, dans la vie du génie. Bien que le récit soit généralement réaliste, l’auteur adopte fréquemment un ton allégorique. Le compositeur rêve qu’il marche sur un pont coloré, porté par des hommes en gris, ces derniers lui prodiguent des conseils, se moquent de lui ou le déséquilibrent en déconstruisant la plateforme. Le scénariste joue également avec la taille du héros. Habituellement minuscule (un peu comme s’il était un éternel enfant), il se voit par moments représenté comme un géant dominant la ville. Ces interludes mis à part, la chronique est factuelle, elle présente essentiellement les déboires d’un surdoué qui n’arrive pas à être reconnu comme tel, alors qu’il fait tout pour y parvenir... sauf des compromis.

Graphiquement, la représentation du protagoniste est banale ; avec ses courtes jambes et son long nez, il ressemble à une créature de Sempé. Les personnages semblent d'ailleurs, pour la plupart, être rapidement exécutés. En fait, dans cet album, ce sont les décors qui séduisent. L’artiste dépeint la capitale au XVIIIe siècle, celle des rues étroites et crasseuses, rendues de belle façon par des couleurs qu’il salit en déposant une fine couche grisâtre ; certaines vues aériennes de l’île de la Cité sont particulièrement impressionnantes.

Morale de l’histoire : tous ne peuvent pas briller dans la Ville lumière.

Moyenne des chroniqueurs
7.0