Charlotte Impératrice 1. La Princesse et l'Archiduc
I
l est grand, elle est petite, il est blond, elle est brune et ils semblent s'accorder au milieu des fleurs. Un rire, et la princesse a élu son héros, celui qui remportera son cœur : Maximilien, archiduc sans fonction, le challenger. Et sa famille se plie à son choix, car elle mérite un mariage d'amour, plus que de raison.
Vous qui ouvrez ce livre, oubliez toute romance sirupeuse. À l'instar de sa célèbre belle-sœur qui l'a éclipsée, l'histoire de Charlotte commence comme un conte de fées : une famille aimante malgré le décès de sa mère, un prétendant charmant qui la déride, un mariage de rêve... Mais les fables s'arrêtent au moment des noces, Charlotte Impératrice en est la preuve. Humiliations, mesquineries, désillusions et déconvenues, le bonheur de la jeune fille se transforme en cauchemar. Et pourtant, Charlotte se bat. Solide comme un roc, elle affronte les épreuves et tire son épingle du jeu, jusqu'à devenir la tête, la force du couple et ce premier tome se termine sur sa victoire en tant que femme, épouse et reine. Le tout résumé en une seule case.
Difficile de croire que, quatre ans plus tard, son destin se fracassera.
Au-delà de l'histoire de princesse, se greffe une subtile chronique familiale faite de jalousies et de bassesses, de piques habilement portées, ainsi que le décryptage d'une situation politique complexe en quelques cases. Pourquoi Napoléon III choisit-il son l'ennemi autrichien pour faire revenir la France en Amérique?
Incontournable figure de l'époque, l'impératrice Elisabeth fait deux apparitions remarquées sur deux planches. Quelques expressions subtiles du visage, un dialogue sobre et c'est toute sa personnalité qui est décrite, explosant, au passage, l'image à l'eau de rose de Sissi. Même si la figure de 1857 est un peu en avance sur la réalité, celle de 1864 est génialement rendue dans sa cruauté en une séquence silencieuse digne d'un Sergio Leone, il ne manque plus que la célèbre musique pour rythmer le drame qui se joue entre les deux couples. C'est tout l'art de Mathieu Bonhomme d'accorder son dessin au récit, de lui donner une touche cinématographique : gai et floral dans la première partie bucolique et les instants où Charlotte se redresse, sombre, sanglant dans les moments où tout s'effondre.
Un duo talentueux qui s'accorde pour magnifier une tragédie oubliée.
7.8