Orcs & Gobelins 4. Sa'ar

S a'ar est grenouilleur, c'est son gagne-pain. Lorsqu'une partie de son clan est massacrée par des vauriens avides de menus fretins, il se retrouve aux fers avec une poignée de survivants. Devenu esclave, il comprend instantanément que s'il ne prend pas l'orc par les cornes il continuera à endurer la loi du plus fort le reste de sa misérable vie. « C'est ainsi, les forts punissent et les faibles subissent » se dit-il. Alors, pour ne plus avoir à subir, nourri par une haine et une détermination farouche, le petit gobelin aux oreilles horizontales décide de ne plus bayer aux corneilles et de s'emparer de son destin à pleines paluches : il veut devenir le maître de la tour de la cité des sangs mêlés. Voici son histoire.

Très productif, Nicolas Jarry (Les Chroniques de Magon, Elfes, Nains) est une "machine à écrire"... Dans ce nouvel épisode, les terres d'Arran étoffent leur univers consacré aux petites créatures anthropomorphes en proposant de découvrir l'ascension étonnante de l'un d'entre eux, de prendre part à sa souffrance et à sa révolte puis d'assister au renversement du pouvoir en place. C'est percutant et irrésistible, car, conduit sur un rythme soutenu, le récit le plus souvent exposé par le gobelin en personne, permet de mieux comprendre ses motivations et de partager ses angoisses et ses rêves de suprématie. Le scénariste n'a rien laissé au "ha-Sa'ar" : le langage souvent argotique propre à l'espèce verte est succulent et donne lieu à des échanges savoureux. Et lorsque la ruse, la patience et les stratagèmes ne suffisent plus, c'est une dague affûtée qui sort de son étui pour le seconder. Pour parvenir à ses fins, le héros est également présenté avec une certaine cruauté et noirceur de l'âme. Mais paradoxalement, le lecteur habilement manipulé par l'auteur, ne peut qu'éprouver de la compassion voire de la sympathie à son égard.

Régal visuel, le dessin tutoie la perfection. Sur une mise en page très dynamique, la paire Vukic (MerlinLe prophète, Elfes) – Deplano (Les Exilés d'Asceltis, Nains) livre un esthétisme de toute beauté, y compris dans les nombreuses petites cases qui rendent un trait réaliste aussi bien sur les décors médiévaux-fantastiques que sur les gueules toutes particulières des différentes races et hordes. Il en est de même pour les scènes de castagne qui parviennent à dégager les mouvements justes et de leurs bonnes vitesses d'exécution. Pour couronner le tout, il est à souligner la présence de vieux parchemins sur lesquels est inscrite la narration pour enjoliver des planches bien colorées par les studios Digikore.

Si le lectorat a pris plaisir à "gober l'un" ou l'autre, alors il se fera une joie de festoyer avec un quatrième volet particulièrement réussi dans tous les domaines !

Moyenne des chroniqueurs
7.3