Chère créature

G rue, étrange créature marine à l’occasion anthropophage et poète, se languit de compagnie humaine, surtout depuis qu’il intercepte des fragments de pièces de Shakespeare glissées dans des bouteilles lancées à la mer. Certain qu’il tient là son âme sœur, il s’empresse de partir à sa recherche. S’ensuit une histoire d’amour contrariée, placée sous l’égide du dramaturge élisabéthain, jusqu’aux dialogues en « pentamètres iambiques », s’il vous plaît !

Le récit est introduit – en BD, ce qui est sympathique – par le non négligeable Craig Thompson, évoquant la solide éducation et la solitude de Jonathan Case, matériaux du personnage principal. En ouverture, une pleine page qui donne le ton – à découvrir.

Voilà une singulière bande dessinée, a fortiori pour une première publication. L’auteur du Tueur de la Green River y fait déjà montre d’une grande maîtrise narrative et graphique, notamment dans le traitement du noir et blanc. La composition guide le regard à travers les pages, ajoutée au dynamisme et à l’expressivité des protagonistes, l’ensemble s’avère d’une lecture très fluide.

Jonathan Case caricature une station balnéaire des États-Unis dans les années 1950-1960 et convoque nombre de références puisées dans le spectre large du cinéma : les séries B du drive-in (Corman) à grand renfort de monstres, western (Craw, un vrai cow-boy du littoral), guerre, comédie, Fellini… Bien sûr, l’ombre de l’horreur estampillée EC comics plane également sur l’album.

Lire Chère créature c’est un peu comme voir une tragédie loufoque déclamée sur de la surf music, une adaptation de la petite sirène qui serait partie en vrille… Ce titre est une curiosité et ne ressemble à rien d’autre !

Moyenne des chroniqueurs
7.0