Valois 1. Le Mirage italien

B lasco, l'Espagnol au cœur brisé par un amour perdu, est contraint par sa famille à prendre la tonsure. Henri de Tersac, jeune damoiseau miséreux n'ayant que son épée à vendre pour survivre, décroche avec peine le poste ingrat de serviteur d'un diplomate. Charles VIII, roi superstitieux et immature, tente de se défaire de la tutelle encombrante de sa sœur, Anne de Beaujeu, en rêvant d'égaler Alexandre le Grand. Trois destins qui se croisent dans une narration en étoile, sur fond de complots politiques complexes, mettant en jeu les grands de cette fin de Quattrocento prêt à sombrer dans un nouveau conflit. Le contexte est posé en douceur, dès les premières planches : la menace que constitue Maximilien d'Autriche réclamant la restitution de territoires, la rivalité entre le pape controversé Alexandre Borgia et son challenger déçu, Julien della Rovere, les querelles intestines au cœur de l’Italie, les intrigues et trahisons au sein même de la famille royale de France. Tous les ingrédients sont en place pour une explosion ravageuse dans une Europe qui sort à peine d'une guerre de Cent Ans.

Après Isabelle, la louve de France, Gloris et Calderon s'attaquent aux campagnes d'Italie de Charles VIII, épisode peu glorieux dont la postérité n'a retenu que le ridicule de la propagation de la syphilis en guise de tribut. Par les yeux du duo antagoniste, Blasco et Henri, qui ne cessent de se chamailler, ils décrivent la mise en place d'un gigantesque jeu de dupes, une toile de cabales digne du contemporain Machiavel, avec multiples acteurs dévoilés au fur à mesure du récit et toute une imbrication d'enjeux diplomatiques, économiques et familiaux. Malgré la complexité du récit, la lecture est facilitée par une progression narrative par briques. La chronique n'échappe pas aux poncifs du genre, avec de courtes évocations érotiques ou de torture qui n'apportent pas grand-chose, à part poser une respiration dans une succession rapide de complots et de violences.

Le dessin s'approche du genre cinématographique, avec un luxe de détails chatoyants des costumes et des décors, alternant les instants de calme et de mouvements brutaux. L'expressivité des personnages est bien rendue, mais aurait pu être poussée plus loin, avec une sensibilité d'acteurs plus crédible. La colorisation réaliste, toute en couleurs chaleureuses, facilite l'immersion.

Un premier tome au scénario dense, qui pose les bases d'une grande fresque méconnue de l'Histoire de France.

Moyenne des chroniqueurs
6.7