Les danois Les Danois

C openhague, 2018. Sorraya, une immigrante d’origine jordanienne accouche d’un poupon blond aux yeux bleus. Il ne fait pas de doute qu’il y a eu adultère, sauf que les tests indiquent qu’il n’en est rien. À l’hôpital, elle partage sa chambre avec Kirsten, une danoise de souche. Son enfant présente également des traits nordiques ; la chose est étonnante, car la femme a trompé son conjoint avec un Mauritanien. Le phénomène prend de l’ampleur et partout en Europe des dizaines de milliers de bambins naissent sans avoir les caractéristiques de leurs parents. L’impact social est immédiat. L’industrie pharmaceutique cherche un remède, les émeutes éclatent et les autorités ferment les frontières en espérant bloquer le virus.

Le point de départ de cette fable, signée Clarke, est original ; le traitement sociopolitique est intéressant et les conséquences qu’il imagine sont plausibles. Les assises du récit sont certes fantaisistes, mais le scénario s’avère cohérent et les acteurs solides. Les nouveau-nés sont en pleine forme, mais les foules réagissent comme s’il s’agissait d’une épidémie mortelle. En fait, c’est d’une certaine façon le cas puisque la thèse affirme que si on gomme les particularités physiques, les distinctions culturelles s’effaceront elles aussi. Tous seront alors heureux dans un monde en paix. Sans totalement sombrer dans une ode au multiculturalisme, le propos s’inscrit dans l’ère du temps. Cette concession à la rectitude politique et aux bien-pensants déçoit, mais sans véritablement gâcher le plaisir de la lecture.

Le dessin, lui aussi signé Clarke, est bien exécuté, discret et efficace. Il appuie l’histoire, sans jamais lui voler la vedette. Le découpage est varié, bien que les planches comptent généralement quatre bandes, il arrive qu’elles se fractionnent (ou se fusionnent) pour mieux souligner un détail. Enfin, un peu tout ce qui se trouve à l’arrière-plan (décors et personnages) est rapidement esquissé et il n’y a pas lieu de se perdre en contemplation dans cet album destiné à une consommation rapide.

Une variation originale sur la question de l'eugénisme, traitée sous la forme d'un petit conte sans réelle prétention.

Moyenne des chroniqueurs
6.0