S.O.S. Bonheur 4. S.0.S. Bonheur Saison 2 Volume…

P resque trente après la conclusion de la trilogie qu'il avait co-signée avec Jean Van Hamme, Griffo relance S.O.S Bonheur, en compagnie de Stephen Desberg au scénario. Ce retour surprise n’est pas véritablement une continuation directe, il s’agit plus d’un reboot total. Si l’allure générale reste la même – une série d’incidents indépendants se déroulant dans une dystopie de type orwellienne -, le cadre et les prémices de cette saison 2 (on appréciera au passage l’ironie de la référence imposée par le monde télévisuel) s’avèrent très différents. En effet, alors que la société imaginée par le créateur de XIII se voulait être une extrapolation très pessimiste du système démocratique occidental, Desberg a imaginé une nation totalitaire finalement très classique : un peu de national-socialisme, une pincée de stalinisme avec, pour finir, une bonne couche du juche nord-coréen. Si le résultat est évidemment effrayant, il est néanmoins légèrement moins menaçant que l’original. Van Hamme avait su faire baigner son histoire dans un quotidien tangible, c’est moins le cas ici.

Plus qu’idéologiques ou politiques, les peurs mises en scène dans l’ouvrage s’appuient directement sur l’actualité : le racisme et le rejet des minorités, le contrôle moral, le néo-conservatisme à outrance et la manipulation des faits. La vie est dure, impossible, particulièrement pour ceux qui ne se fondent pas dans le moule caucasien de vigueur et pour ceux qui osent, crime gravissime s’il en est, poser des questions. Le scénariste a parfaitement cerné son sujet et, à l’image des nombreux autres titres du genre (Bonne année de Baru, Le pouvoir des innocents de Brunschwig et Hirn ou Péché mortel du duo Béhé/Toff) réussit à imposer une atmosphère lourde et implacable à ses héros. Petit-à-petit, les frustrations et les injustices commencent à s’accumuler et, subrepticement, la pression monte.

Ce que le trait de Griffo a perdu en spontanéité a été gagné en finesse et en précision. Le style réaliste quasiment froid associé aux excellentes couleurs volontairement sévères de Florent Daniel plongent immédiatement le lecteur au centre des débats. Les joies sont toujours de courtes durées et cachent immanquablement quelques mensonges. Quant aux coups durs, ils font mal, très mal, tout simplement.

« Préface par Jean Van Hamme » annonce la couverture, passé outre le côté marketing de l’entreprise, ce nouveau cycle de S.O.S Bonheur est une lecture prenante qui offre une peinture inquiétante des pires aspects de notre époque.

Moyenne des chroniqueurs
6.3