Le nouveau monde 1. L'épée du conquistador

A u début du 16è siècle, l’Espagne de Charles Quint vogue plein ouest pour découvrir le Nouveau Monde, qui ne s’appelle pas encore l’Amérique. En 1520, Cortés vainc l’empire Aztèque à Tenochtitlan, future Mexico. Les enfants de l’empereur sont sacrifiés, à l’exception d’une petite fille. Dix-huit ans plus tard, celle-ci, Dona Isabel, est promise en mariage à Nuno de Guzman, brute ne rêvant que de sang et d'or. Dans le même temps, le Pape envoie un jeune moine, frère Marcos, avec le double dessein de convertir les Aztèques au christianisme et d’explorer les contrées au nord de la cité, encore inconnues. Celui-ci, disciple franciscain de Bartolomé de Las Casas, prône que les indiens ont une âme et que la conversion doit s’effectuer par l’adhésion, et non par la violence. Chacun suivra sa quête, vers l’or, la liberté ou les terres nouvelles.

Les auteurs de ce premier tome du Nouveau Monde (prévu en deux épisodes) sont néophytes en matière de bande dessinée. François Armanet et Jean Helpert (scénario) œuvrent respectivement dans le journalisme et l’animation ; Xavier Coyère (dessin) s’est surtout distingué dans l’illustration, la publicité et le story-board. Pour autant, L’Épée du conquistador montre une maîtrise totale du neuvième Art.

À la croisée du récit historique et du western, Le Nouveau Monde est une aventure palpitante, construite avec rigueur, dont les ressorts reposent sur les désirs et les antagonismes des personnages. Il s’agit d’échapper à des noces promesses d’humiliations, de s’enrichir sans limite, de conquérir son libre arbitre ou de sauver sa peau. Guzman, le prédateur, ne renonce jamais, le jeune ecclésiastique n’est pas insensible à la téméraire Dona Isabel et Esteban, ancien esclave promu puis trahi, a toute une vie de souffrance à venger.

Le graphisme de Coyère, qui lorgne avec bonheur vers celui de Giraud ou d’Hermann, rend parfaitement la poésie des grands espaces et le souffle épique des univers de Blueberry ou de Comanche. La beauté ou la morgue des individus n’est pas oubliée. Le charme d’Isabel, l’élégance d’Esteban et l’innocence de Marcos rencontrent la dignité des puissants, la haine de Guzman et l'embonpoint de l’évêque. L’œil se régale, l’esprit se délecte.

En attendant de savoir si les attentes placées dans la suite et le dénouement seront comblées, cet album mérite de retenir l’attention des amateurs d’histoires dans lesquelles les codes classiques côtoient des idées neuves.

Moyenne des chroniqueurs
7.3