Jeremiah 35. Kurdy Malloy et Mama Olga

K urdy veut retrouver son copain Chorizo. Problème, ce dernier est incarcéré dans le camp de « rééducation » de la milice. N’ayant pas trop le choix et sentant la bonne combine, il accepte la proposition de faire la mule pour le compte de Mama Olga. Ce n’est pas très reluisant, mais, au moins, ce petit trafic lui permettra d’entrer dans cette prison en plein air. Reste maintenant à mettre la main sur son pote et à faire en sorte de sortir vivant de l'entreprise.

Série emblématique de la longue carrière d’Hermann, Jérémiah entame sa trente-huitième année en presque autant d’albums. Dans Kurdy Malloy et Mama Olga, l’auteur propose un retour en arrière sur un épisode de la jeunesse du futur compagnon de Jérémiah. L’intrigue, plus anecdotique qu’autre chose, sert surtout de prétexte pour tenter de cerner les racines du caractère contrasté du jeune aventurier. Kurdy va brutalement devoir faire face aux conséquences de ses choix dans un univers ultra-violent et sans pitié. Au centre du récit trône Mama Olga, une espèce de matrone mystique et vénale. Celle-ci sert de point pivot résumant de l’échec moral de la société. Ce n’est pas à quasi quatre-vingts ans que le créateur des Tours de Bois-Maury va changer et son point de vue est bien connu de tous les bédéphiles : la Bête, ce sont les hommes. Ce dernier arrive néanmoins à donner un peu d’humanité à ses personnages. En premier lieu, le jeune Kurdy en prend pour son grade, mais évolue. Puis, et surtout, il y a Olga, cette épave cynique qui voulait encore croire à un dieu aimant ou, du moins, à un interlocuteur compréhensif et patient. Pas de chance pour eux.

Graphiquement, mis à part un lettrage fluctuant, le dessinateur n’a pas perdu la main. Scènes crépusculaires à faire frissonner, soleil brûlant qui accable les détenus et des silhouettes décharnées aux fasciés démolis, le tableau n’est pas paradisiaque, mais ô combien percutant. Il n’y est pas question d’esthétisme, mais de réalité brute montrée sans concession.

En résumé : un trente-cinquième volume offrant quand même quelques surprises, une réalisation efficace non dénuée d’un certain panache, Kurdy Malloy et Mama Olga offre un excellent et effrayant moment de lecture.

Moyenne des chroniqueurs
6.0