Les grandes batailles navales 1. Trafalgar

E n septembre 1805, la moitié de la flotte française mouille dans la baie de Cadix, au sud de l’Espagne. Elle est commandée par le vice-amiral de Villeneuve, plus connu pour son extrême prudence, conférant parfois à la lâcheté, que pour son audace. Les marins s’ennuient, les officiers s’inquiètent et l’Empereur demeure silencieux. La mission qui avait été confiée à l’escadre a échoué ; elle consistait à attirer la Royal Navy aux Antilles, afin de lever le blocus de la façade atlantique imposé par les Anglais et de permettre aux troupes françaises d’envahir leur éternel ennemi d’outre-Manche. Les ports restent bloqués et le légendaire amiral Nelson prépare sa riposte.

Les éditions Glénat lancent une série consacrée aux grandes batailles navales. L’objectif, indéniablement pédagogique, consiste à montrer combien les combats menés sur les mers et les océans ont contribué à modifier ou conserver les équilibres géopolitiques. Il est aussi de restituer des faits, des personnages et des vaisseaux avec une exactitude indéniable. La caution du Musée national de la Marine et le dossier se trouvant en fin d’album en attestent.

Jean-Yves Delitte, qui signe les scénarios, est peintre officiel de la Marine et membre de l’Académie des Arts et Sciences de la Mer. Fort d’une œuvre conséquente (Black Crow ou Le Sang des lâches), il livre ici un récit subtil évitant les poncifs de la bande dessinée historique qui se voudrait trop pointilleuse ou démonstrative. Il ne s’attarde guère sur la confrontation physique, mais détaille plutôt les semaines précédentes, tant du côté anglais que français. Il met en évidence les difficultés de communication au sein de l’armée française et la détermination du commandement de la Royal Navy.

Par ailleurs, Delitte a la bonne idée de prendre le point de vue de matelots anonymes, commentant les événements sans véritablement les comprendre, loin du conflit franco-anglais, mais en première ligne pour perdre un membre ou la vie. L’écueil d'exposer l’histoire par « en-haut » est contourné et permet au lecteur d’entrer de plain-pied dans les péripéties.

C’est Denis Béchu qui se charge du dessin sur cet épisode. Le jeune dessinateur offre un travail irréprochable, croquant de vraies gueules burinées, des navires élégants et des paysages maritimes gracieux. Le travail sur la couleur est remarquable et la précision du trait ne nuit aucunement à l’impact visuel.

Trafalgar est une réussite. La reconstitution est soignée, sans être lourde, la dimension didactique s’efface derrière la tension narrative et les ficelles de la fiction permettent d’entrer dans un épisode majeur de la saga napoléonienne. Appareillez et allez humer l’air du large avec cet épisode prometteur.

Moyenne des chroniqueurs
7.0