Le concile des arbres

R ien ne va plus à l’Hôpital Royal pour femmes et enfants. Depuis quelques temps, à minuit pétante, six orphelins en transe montent sur le toit de l’établissement pour psalmodier d’étranges litanies. Une enquête, diligentée par le Ministère Public des Affaires Privées, est confiée aux agents Artémis d’Harcourt et Casimir Dupré, un couple de limiers qui s’entend comme chien et chat.

Nicolas Bara fait parti de cette école de dessinateurs - Virginie Augustin, Vincent, Bruno Maïorana... - à l’aise avec le XIXe siècle et dont les héroïnes sont interchangeables : nez aquilin, regard siamois, taille de guêpe et seins pommelés (ce dernier point justifiant sans doute pourquoi Artémis passe les trois quarts de cette aventure en corset)... Héritier de Loisel, l'auteur s’affirme néanmoins avec un style tout en rondeurs : le dessin est jovial, les formes replètes, l'encrage charnu tout en étant d'une parfaite lisibilité. Et pour le plus grand plaisir du lecteur, les décors sont d’une grande générosité, à l'image des figurants qui sont fignolés tant dans les attitudes que dans les costumes. Le découpage fluide et les cadrages inventifs prouvent une belle maîtrise pour un second album. Autant de qualités qu’une mise en couleur chaude et soignée achève de rendre fort sympathiques.

Coté scénario, on reste sur du classique polar fantastique des années 1800, période toujours propice à ce genre de récits où la science le dispute à l’obscurantisme, le cartésianisme à l’ésotérisme. Sans trop de surprises mais accompagné d'une dystopie administrative assez bon enfant, les mésaventures d’Artémis et de Casimir se déroulent sur fond de comédie. Pierre Boisserie offre ainsi à son compère un canevas bien agréable à l’expression de son talent grandissant. Une conclusion s'impose en effet : Nicolas Bara est un auteur à surveiller, définitivement.

Moyenne des chroniqueurs
6.7