Hell West 2. Wendigo

1875, la tension atteint son paroxysme à la frontière entre les White States of América et le Hell West. La prêtresse winnock a invoqué l'aide des wendigos et fait jaillir du sol un démon de la taille d'un building. Passée de l'autre côté du mur, en quête des esclaves vendus aux winnocks, l'escouade de Jack Outbust se retrouve face au monstre et ce dernier ne doit sa survie qu'au sacrifice de Tom Little, l'homme-loup, le chaman indien dont seule la puissance peut contrer les maléfices des habitants de l'Ouest sauvage. Le Général Grant d'en conclure : les WSA sont en guerre avec le Hell West.

Résumé ainsi, l'histoire parait atrocement obscure. En effet, Vervish et Lamy ont concocté une Amérique alternative particulièrement riche, coupée en deux. L'homme blanc est contraint de composer avec les tribus peaux-rouges qui sont les seules à pouvoir contrer ce qui vient de l'Ouest, une vaste étendue sauvage, peuplée de créatures étranges et magiques, résolument hostiles. L'essence du scénario consiste à montrer comment on crée une guerre en organisant et faisant monter la haine de part et d'autre de la frontière. Chaque camp se trouve ainsi manipulé, poussé à commettre de plus en plus d'exactions en réponse à ce qu'il subit, jusqu'à la phase de non-retour. Les personnages sont aussi denses que le décor dans lequel ils évoluent, c'est un plaisir pour l'amateur d'aventures Far West que découvrir tous les clins d'oeil et détournements de personnages célèbres de l'époque : Buffalo Bill, Tom Sawyer, Lee, Grant... Personnage complexe et particulièrement controversé dans l'Histoire ou la fiction, le général Custer est mis en scène avec toute sa folie et sa mégalomanie, à fois tyran ridicule et effroyable stratège va-t-en-guerre. Ici, point de héros, juste des hommes avec leurs défauts et leurs intérêts qui les poussent d'un côté ou de l'autre de la barrière entre le Mal et le Bien.

Si le premier volume était un gros pavé, la taille du second peut surprendre, mais il n'en est pas moins dense. Frontier Force posait les bases de l'univers et les phases de manipulations visant à l’Armageddon ; Wendigo en dénoue les fils avec une certaine dextérité, bien que le final laisse un peu sur la faim. La guerre semble repoussée, l'arme secrète du prêcheur fou a disparu, mais les rancœurs sont toujours là. Et lorsque les trois lettres s'affichent et qu'il ne semble pas d'autres tomes de prévus, c'est la frustration, peut-être le plus beau compliment pour ce comics franco-belge totalement édité par crowdfunding. Un seul bémol néanmoins pour la qualité des dialogues qui mise sur un registre résolument familier, pour ne pas dire vulgaire. Il veut peut-être transcrire la dureté et la lassitude, mais le ton sonne faux, anachronique dans la bouche d'officiers supérieurs et de soldats aguerris.

Il ne reste plus qu'à parler du dessin de Frédéric Vervish : un superbe fondu de noir et blanc, un trait qui marie la pureté du design presque conceptuel au rendu réaliste quasi photographique. L'auteur joue sur les réglages des contrastes pour donner un rendu à la fois brut et raffiné, qui dégage une force aussi sauvage que le récit.

Moyenne des chroniqueurs
7.0