Boca Nueva 1. Soufre
B
oca Nueva, une cité-État judicieusement située pour être la plaque tournante du commerce international, légal ou illégal. Ville-lumière, ville corrompue, sur le modèle de la Venise de la Renaissance, elle attire autant les boucaniers que les réfugiés économiques, tous en quête d'une vie meilleure. Ese Kululu est de ceux-là. Issu d'un peuple de pêcheurs en proie à la pénurie, en charge de gagner suffisamment de quoi payer la dot de sa sœur, il vient retrouver un cousin qui lui a fait miroiter un job en or dans les sous-sols de l'administration. Malheureusement, l'émigré naïf fera les frais des accointances entre la police et le crime organisé. Il sera affecté à la Criminelle, dans les pattes de Riggs, un vieux briscard alcoolique et fier-à-bras qui a perdu son coéquipier en mettant son nez de chien de chasse là où il fallait pas.
Un héros candide, un flic roublard sur (toile de) fond de guerre des gangs et d'élites corrompues, la ficelle est classique. Transposée dans un univers médiéval-fantastique à la Donjon, Boca Nueva fonctionne parfaitement. Tout y est : l'intrigue policière, les scènes décalées, les explosions, les complots, l'improbable duo, l'humour, les tavernes douteuses, la crique aux pirates et une magie à peine esquissée mais suffisamment pour mettre l'eau à la bouche dans une scène effroyable de massacre. Juste quelques petites touches, des crânes de montres, des oiseaux mutilés semblables à des poupées vaudou et cela suggère une menace terrible, un culte étrange. Boca Nueva est un régal dans ses détails graphiques composant un monde très bien construit qui rappelle les délires de Trondheim. C'est la preuve que l'on peut faire un ouvrage de qualité en mixant tous les clichés de plusieurs genres : flibuste des Caraïbes, polar politico-mafieux saupoudré de Fantasy.
Un véritable premier album, à la fois pour le scénariste et pour le dessinateur, qui a tous les ingrédients d'une grande série d'aventure. Un joli démarrage à surveiller.
7.0