La nouvelle encyclopédie de Masse 2. M - Z

D e Malacologie à Zoomorphisme, en passant par Octo-pantalonisme ou Priapisme maritime, Francis Masse égrène dans ce deuxième volume de sa Nouvelle encyclopédie de Masse, version actualisée de celle parue en 1982, de savantes et abstruses élucubrations autour de quelques concepts improbables.

Premier constat : intemporel, le propos de ces petites histoires à longueur variable, publiées au départ dans des magazines tels que Métal Hurlant, Hara Kiri ou Charlie Mensuel, reste puissamment original. Le ton est difficile à définir. Il y a bien sûr un côté parfaitement absurde, un décalage qui permet à l’auteur de voir la réalité sous l’angle du sarcasme, de la dérision, et de puiser dans sa désillusion une inspiration qui n’appartient qu’à lui. Si le rire est parfois au rendez-vous, il ne manque pas d’être jaune, trouvant ses ressorts dans la bassesse et l’inépuisable imbécillité du genre humain. Ailleurs, le sourire s’effacera devant un cynisme qui ne connaît pas de limite.

Second constat : la réalisation est parfaite, dictée par un professionnalisme jamais pris en défaut. Le dessin, au style varié mais à la patte immédiatement reconnaissable, est d’une précision incroyable : inventivité du trait, don inné pour la caricature, fourmillement de détails dans des décors époustouflants, mouvement on ne peut mieux restitué... et une constance qui ne se dément pas. Entrecoupées de quelques croquis satiriques et de photos de sculptures réalisées par l’artiste lui-même, les entrées de l’encyclopédie se succèdent sans forcément se ressembler, mais participent toutes à la création d’un ensemble cohérent, à la fois drôle et désespérant, virtuose et interloquant.

La conclusion s’impose d’elle-même : voilà une œuvre rare, d’une richesse incomparable, qui allie une certaine légèreté à une vision irrémédiablement noire et désabusée du monde. Quelque part entre triste lucidité et joyeuse échappatoire, Francis Masse trace son iconoclaste sillon. Avalée à petites doses, la soupe est plus exaltante que véritablement amère.

Moyenne des chroniqueurs
8.0