Hello Fucktopia Un vrai conte de fées

S on éternel casque audio rouge sur les oreilles, Mali sirote un énième whisky au Black Cat, un bar mal famé parisien. Fraîchement débarquée dans la capitale, elle suit des études pour devenir dessinatrice, mais aller à la fac l’emmerde profondément. Ses plaisirs ? Elle n’en a guère, sinon des joies éphémères passant par la défonce ou des rencontres d’un soir. Il y a bien ses deux amis, Stéphane et Thémis, qui lui apportent un semblant d’équilibre, mais la recherche permanente de sensations fortes prend rapidement le dessus.

Même si le lien de parenté avec Maliki, qui a connu son petit succès dans la blogosphère et à travers les six tomes édités chez Ankama, est évident, Souillon réalise avec Hello FuckTopia un album aux ambiances beaucoup plus sombres. La préface éclaire d’emblée sur les intentions de l’auteur : le récit se veut autobiographique, surfant sur les souvenirs de jeunesse, les rêves brisés ou les blessures profondes de l’enfance. Inutile alors de chercher absolument un fil conducteur à l’histoire de Mali : les événements s’enchaînent d'une façon qui n’est pas nécessairement rationnelle. Le plaisir vient essentiellement de suivre les saynètes, comme autant d’errements d’une jeune fille désenchantée cherchant dans ses débauches une échappatoire. La pirouette de la dernière planche laisse cependant un arrière-goût un poil trop sucré alors que le palais s’était pendant près de quatre-vingt pages habitué à l’amertume et à l’acidité.

Le traitement graphique emprunte, comme sur Maliki, au manga sans que le franco-belge ne soit complètement écarté. C’est dans ce parfait équilibre que le dessin de Souillon révèle son efficacité : personnages typés et attachants, décors soignés et détaillés, érotisme suggéré mais jamais vulgaire, le tout rehaussé par un large panel de couleurs qui font partie intégrante du récit.

Deux lettres seulement séparent Mali de Maliki mais le lectorat est certainement très différent, contrairement au plaisir qui, lui, ne change pas.

Moyenne des chroniqueurs
7.0