Un petit livre oublié sur un banc 1. Volume 1/2

C amélia s’ennuie. Son conjoint prête plus d‘attention à la notice d’utilisation de son nouveau portable qu’à ses conversations. Au boulot, sa collègue, un poil vulgaire, la considère au mieux comme un pis-aller présent dans son entourage. Lorsque, sur le banc d'un square, elle découvre un livre truffé d’annotations, son appétit pour le romanesque se trouve ranimé. Bientôt, elle se met en tête de découvrir l’identité de l’inconnu avec qui elle échange des messages de plus en plus fréquents…

Jim continue de broder des histoires sur les aspirations contrariées ou les espoirs désenchantés d’une génération qui n’a pas encore définitivement abandonné l'idée d’introduire une dose de rêve (voire de fantasme à concrétiser) dans son quotidien. Dans le sillage du succès rencontré par Une nuit à Rome (sorte de Place des grands hommes intime et sexy) et Une petite tentation, voici donc Un petit livre oublié sur un banc, comédie romantique qui se lit sans faim mais qui, comme certains mets, ne nourrit guère un lecteur un tant soit peu exigeant.

Car une fois que le concept du bookcrossing (qui consiste à mettre à disposition du premier curieux venu, dans un endroit public, un livre pour qu’il connaisse une seconde vie) est intégré, le déroulé des péripéties de Dame Camélia ne se caractérise pas par une abondance de surprises ébouriffantes qui seraient dévoilées à une cadence infernale. En dépit d’un rebond plutôt malin placé en fin de cette première partie qui réveille l’intérêt, l’ensemble donne l’impression de s’adresser en priorité à des bédéphiles occasionnels. Cible que l’auteur prend soin de ménager en évitant d’offrir une densité et une concision à son récit qui aurait pu probablement se dérouler sur un tome unique à la pagination légèrement plus étoffée. Du travail de pro, sans aspérités.

Le trait est à l’avenant, plaisant, adapté au sujet, avec ce qu'il convient de fraîcheur mais un peu passe-partout et sans la carte « charme » de la dernière escapade romaine du scénariste. Et, pour idiote qu’elle soit, l’envie d’imaginer un Julie, Claire, Cécile dessiné par Carlos Gimenez vient à l’esprit, tout comme l’espoir que les personnages soient épargnés par quelque cervicalgie aigue (quels cous, mes amis !).

Avec des arguments différents, le rapprochement avec S. (Michel Lafon) signé D. Borst et J.J. Abrams (Alias et Lost pour le petit écran, les deux derniers Star Trek au cinéma notamment) est inévitable. Là, un homme et une femme correspondent également dans les marges d’un vieux bouquin commercialisé dans une version de type fac similé. Bluette il y a aussi, et le curieux est invité à tenter (la précision a son importance) de résoudre l’énigme associée à l’auteur et à l’œuvre qui sert de support à leurs échanges manuscrits. Plus ludique et plus « gadget » aussi puisque qu’il regorge de documents divers insérés dans ses pages, bien plus tarabiscoté dans l'exposé des mystères à résoudre (indécrottable Abrams !), S. illustre une autre facette du « passe-livre », formule qui ne devrait pas finir d’inspirer. Il propose en tout cas une véritable touche interactive aux plus joueurs, qui fait défaut à la création de Jim et Mig, dès lors totalement connotée « romance par procuration ».

« Certains livres peuvent changer une vie… » affirme le bandeau rouge qui ceint Un petit livre oublié sur un banc. Pluriel de rigueur pour le simple lecteur passif car il serait aventureux de tout miser un seul.

Moyenne des chroniqueurs
5.0