Silas Corey 1. Le Réseau Aquila 1/2

H éros de la guerre des tranchées pour les uns, dandy sans patrie, sauf celle de l’argent, pour les autres, Silas Corey est un détective qui se vend au plus offrant et qui n’hésite pas à jouer double, voire triple, jeu. Accompagné de son fidèle Nam, serviteur dévoué et souffre douleur attitré, il se met au service de Clémenceau, pour tenter de mettre la main sur un message envoyé par l’insaisissable espion allemand Aquila. Mais celui-ci existe-t-il vraiment ?

Un enjeu politique se joue au cœur du conflit qui déchire l’Europe de 1917. Un affrontement entre nations qui ne profite qu'aux marchands d’armes lancés dans une folle course à l’armement ou tout est bon pour maximiser les profits financiers sans jamais chercher à minimiser les pertes humaines. Espionnage en temps de guerre, contraste entre réalité des tranchées et frivolités de la vie parisienne insouciante sur fond de bataille politique pour conquérir le pouvoir. Programme classique, au rythme effréné et aux dialogues finement ciselés et édulcorés à l’efficacité. Le principal est assuré : le plaisir de lecture.

La souplesse du trait de Pierre Alary fait encore merveille. Sa dextérité à s’adapter à un nouvel univers n’est plus à démontrer. Son Silas a l’élégance d’un Arsène Lupin à qui Nury a greffé le caractère et la répartie acide d’un Hugh Laurie en blouse blanche au meilleur de sa forme. Son fidèle Nam en fait les frais pour le plus grand plaisir du spectateur. Car il ne faut pas s’y tromper, c’est bien un spectacle que cette aventure. Le nom à l’anglo-saxonne n’est pas là pour égarer, Fabien Nury affiche sa volonté de faire de son personnage un héros à l’américaine, avec Cinémascope, espionne à la Mata Hari sur fond (d’écran ?) d’amour manqué. La principale qualité de cette première partie du Réseau Aquila réside dans la lisibilité exemplaire, le tempo et la sobriété de l'introduction. Un album coup de poing qui captive dès les premières pages avec une mise en scène qui privilégie de courts flash-back pour poser la psychologie des protagonistes. Technique qui permet de lancer l’action avec une plongée immédiate au cœur du récit puis de faire des pauses sans ralentir la cadence. L’absence de préliminaire c’est parfois efficace !

Un contexte historique agrémenté d’une fiction bien ficelée et le tour est joué. Facile à dire mais plus difficile à faire. C’est pourtant devenu une habitude chez Fabien Nury qui a mis un tigre dans son moteur créatif, et c’est tant mieux !

Moyenne des chroniqueurs
7.8