Spirou et Fantasio 53. Dans les griffes de la Vipère

Le journal de Spirou est au fond du trou. En cessation de paiement, il est obligé de faire appel à un investisseur extérieur. Le contrat trop vite signé impose la perte de liberté totale de Spirou lui-même qui devient l’homme-sandwich et le jouet d’un actionnaire majoritaire.

Courir est une habitude pour le compagnon de Fantasio. Pour sauver quelqu’un ou quelque chose, le monde également, ou tout simplement pour se sauver lui. Depuis soixante-quinze ans, il court et le fan derrière lui avec plus ou moins d’entrain selon le duo de repreneurs missionnés par Dupuis pour tenter de succéder à Franquin. Avec Dans les griffes de la vipère, Yoann et Velhmann respectent la tradition et introduisent les éléments de contexte actuel de la crise économique qui va toucher de plein fouet le journal de Spirou et pousser le groom dans ses derniers retranchements pour combattre un milieu qu’il ne connait pas : celui des requins de la finance.

Moderniser le personnage, Tome et Janry s’y sont essayés avec Luna Fatale et surtout Machine qui rêve sans qu’on leur laisse le temps de vraiment persuader. Après quatre épisodes signés Morvan et Munuera n’ayant pas convaincu, le nouveau duo s’essaye à la rénovation avec une touche de classicisme combinée à des fragments contemporains, le tout en puisant allégrement dans le bestiaire de l’œuvre, même si c’est principalement en tant que cliffhanger ici. Leur troisième album utilise le journal comme moyen d’atteindre notre héros. Attaquer un emblème n’est pas sans risque mais l’idée d’appliquer les difficultés financières du monde de la presse au périodique de l’éditeur Dupuis est une mise en perspective intelligente, malheureusement légèrement sous exploitée puisque uniquement prétexte aux péripéties, accompagnée de clins d’œil et de gentilles moqueries. Et le résultat est là, courses poursuites il y a, peut-être à l'excés d'ailleurs. Malmené d’un bout à l’autre de l’aventure, le petit bonhomme en rouge arrive à peine à reprendre en main son destin et semble décider de son sort, même si l’issue n’est pas forcément celle qu'il en attendait. Fin d’ailleurs trop rapide et quelque peu bâclée, ce qui pourrait être l’un des reproches à formuler.

Dans les griffes de la vipère semble être le bon, celui de l’assurance d’avoir trouvé ceux qui seraient en mesure de donner une nouvelle vie trépidante au héros de Marcinelle. En tout cas pour les lecteurs qui arriveront à s’exonérer du lourd héritage et d’enfin accepter de passer à autre chose à condition que la qualité reste présente.

Moyenne des chroniqueurs
6.8