Une histoire du 36 Quai des Orfèvres 1. Le mystère HB
H
B, deux lettres qui rappellent un fait divers qui allait tenir en haleine la France pendant près de 48 heures il y a une vingtaine d’années de cela. Celui qui porte ce pseudonyme entre dans une école maternelle, séquestre une classe et menace de tout faire sauter. Alors que la population est inondée par des images provenant de Neuilly, des femmes et des hommes œuvrent pour traiter, au mieux, cette prise d'otages.
Premier album qui devrait en appeler d’autres consacrés à des affaires marquantes dans lesquelles la police a eu un rôle prépondérant, Le mystère HB prend le contrepied de ce que le lecteur pouvait attendre d’un tel sujet, tout du moins de prime-abord. Il n’est pas ici question d’action, encore moins d’émotion ou de fine psychologie - quoique -, mais plutôt d’un déroulé purement factuel de ce qui s’est passé dans l’enceinte scolaire à partir du moment où les forces de l’ordre l’ont investie, cela à travers le regard de Claude Cancès (Histoire du 36 quai des Orfèvres et Les seigneurs de la Crim'), patron du 36 à l’époque. À ses côtés, au scénario, ont œuvré Pierre Dragon, qui travaille à la Préfecture de police et qui a, en d'autres temps, collaboré avec Frédérik Peeters autour de la série RG, et Alain Gillot.
En ouverture du livre, une courte note précise l’intention des auteurs, "nous voulons restituer les faits, rien que les faits", l’idée étant de ne pas céder au sensationnalisme. Pour ce faire, il fallait un dessinateur qui se mette en retrait, en cohérence avec la démarche voulue. C’est Léo Quievreux (La mue sur un scénario de Tanguy Ferrand chez Carabas), plutôt habitué à des officines offrant une totale liberté graphique (Agents dormants chez L’Association et aussi, voire surtout, ses travaux chez Le dernier cri et d'autres éditeurs underground), mais aussi illustrateur de presse, qui va se mettre au service de cette austère mission. Au premier coup d’œil, l’ensemble parait figé, basique, sans esbroufe aucune, les couleurs sont sans éclat, les visages pour ainsi dire inexpressifs, et pourtant, ce choix potentiellement frustrant se révèle fort cohérent avec la volonté initiale, à savoir laisser la part belle à une sobre restitution des événements vécus de l’intérieur. Le contrat est rempli, la personnalité des protagonistes (les hommes du RAID, l’institutrice, les médecins du SAMU et des pompiers), comme gommée, permet au lecteur de s’immerger pleinement dans l’absurdité de la situation et les incertitudes qu’elle recèle. En face, dans sa bulle, immobile et insondable, a priori déterminé, Human Bomb. C'est lui, paradoxalement, dans les quelques lignes qu'il rédige dans ce qui est sa dernière nuit - son chant du cygne -, qui apaise la tension du récit, comme s'il baissait alors la garde. Mais ça, à cet instant, personne d'autre que lui ne peut le savoir.
Cette collection intitulée Une histoire du 36 quai des Orfèvres semble devoir s’adresser plus particulièrement à ceux qui préfèrent la sobriété des faits à la débauche d’effets. Le mystère HB fleure bon le vrai, froidement narré, c’est là que réside toute sa saveur.
7.0