Jérôme Moucherot (Les Aventures de) 5. Le manifeste du mâle dominant

J érôme Moucherot. Le Jérôme Moucherot. Celui grâce à qui l’imprévu n’a plus mise dans notre monde. Comment, vous ne connaissez pas ? Ce livre est fait pour vous. Vous apprendrez grâce à lui tout sur ce grand fauve. De sa survie dans la jungle, à la séduction de son âme sœur en passant par le domptage de son animalité : tout, vous saurez tout sur le Jéjé. Découvrez maintenant l’archétype du mâle dominant !

Il y a treize ans sortait le dernier album de Jérôme Moucherot. L’année même où François Boucq présidait le Festival d’Angoulême. C’est en douceur que s’effectue aujourd’hui ce retour. Il n’embarque pas ici son Tarzan de l’assurance dans une aventure au long cours, dans le but de chasser les tracas du quotidien et la peur du lendemain. Au lieu de cela, il choisit de dresser le portrait de son héros. Aidé par un sûrement brillant spécialiste, il nous l’introduit, en tout bien tout honneur, au travers de plusieurs saynètes. L’homogénéité de l’ensemble en souffre un peu et n’échappe pas à de légères redites par rapport aux précédents opus. Mais les fans de la première heure seront vite rassurés de retrouver ce qui faisait le sel de ces péripéties : un surréalisme on ne peut plus farfelu déformant une banale réalité. Jouant de tous les codes, surtout graphiques, c’est dans cette série que le talent de Boucq s’exprime le mieux. D’improbables perspectives vertigineuses en arabesques de mouvements limpides, il utilise toute la grammaire de son art pour donner vie à son imaginaire saugrenu où l’urbanité côtoie l’animal. Cette folie créative a bien sûr un défaut : tout le monde n’adhérera pas forcément à cette logique irrationnelle, tant l’auteur se plaît à tordre le cou à bon nombre de principes et d’expressions dans le seul but d'amuser le public.

La couverture, au diapason du ridicule de son personnage, ne doit pas être un frein à la lecture de cet ouvrage. Essentiellement connu de nos jours pour son Bouncer, il serait dommage de passer à côté de ce qui fait la particularité du dessin de Boucq et qui se déploie sans contraintes dans cette œuvre. Surtout quand celui-ci s’est embêté à affubler son narrateur d’un vieux cycle tout au long de l’histoire. À l’ère du dopage numérique, ayez un peu de respect pour les kilomètres d’encrage parcourus à coup d’amour et de lignes à peu près claires…

Moyenne des chroniqueurs
6.5