Midgard 1. L'invasion / L'évasion

C ôté pile, c’est une invasion classique de Vikings qui vient perturber la vie paisible et rugueuse de paysans et de marins flamands. Le tout vu sous l’angle semi-humoristique d’un enfant qui tente de survivre seul dans cette communauté devenue hostile à l’arrivée des envahisseurs. Côté face, l’espace, un vaisseau immense, une section de prisonniers extra-terrestres qui, en guise de mission de réinsertion, va devoir gérer un troupeau de larves beuglantes pour assurer le renouvellement de l’espèce. Un jeun alien, rebelle et facétieux, n’accepte pas l’autorité et va essayer de se libérer de ses chaines et de voler de ses propres ailes en subtilisant une navette spatiale et en se dirigeant vers la planète Terre. Que le lecteur choisisse par quelle face commencer, celles-ci sont présentées tête bêche et se rejoignent au milieu du livre, comme les protagonistes.

Un bouleversement généré par la rencontre improbable d’un monde médiéval réaliste avec celui imaginaire d’un univers de science-fiction peut réserver de bonnes surprises. Mais l’alchimie ne prend pas. Peut-être parce que la rencontre n’est qu’esquissée, laissant un goût de trop peu en attente d’un deuxième tome ? Mais surtout parce que le ton n’est pas juste. Celui-ci oscille entre un dessin tout en rondeur proche du dessin animé japonais (le jeune E.T. est un Astroboy inachevé) adapté à l’humour et la dure loi imposée par les féroces Vikings, trop brutale. Il n’est pas question de manque de crédibilité puisque la base de départ l’écarte d’entrée, mais l’équilibre n’est tout simplement pas assuré et il en résulte un sentiment d’inadaptation. La cruauté peut rimer avec humour lorsqu’il s’agit de second degré, difficilement avec une dérision cartoonesque. Les onomatopées servant de patronyme aux étrangers venant de l’espace (Oon, Umpf, Argh, etc. ), apportent un aspect ridicule qui n’arrange rien et les sourires en coin du gamin flamand, pourtant confronté à une injustice flagrante, n’aide pas à la cohérence. Si Steven Dupré (Kaameloot) développe un graphisme agréable et maitrisé, il semble que le mélange des styles soit plus dévastateur que favorable.

On ne peut pas reprocher un réel travail sur l’originalité, mais cela ne suffit pas à aboutir à un récit attrayant pour l’instant. Peut-être que les épisodes suivants, édités dans une présentation plus classique maintenant que les protagonistes sont réunis, apporteront des éléments complémentaires qui éclaireront favorablement cette histoire. C’est tout le mal que l’on peut souhaiter à Midgard.

Moyenne des chroniqueurs
4.0