La créature des ténèbres

D ans les profondeurs du Paris de la Belle Epoque une créature mystérieuse engloutit les ouvriers du métropolitain en cours de construction. Pour résoudre l'énigme, Léontine et Bombardon jouent les Sherlock Holmes et découvrent une base souterraine où sévit le maléfique professeur Rötlich...

Paru dans la collection Lily Mosquito, cet album vient de loin. Créée pour Triolo en 1971, l'histoire fut publiée en épisodes dans Pif-Gadget, puis éditée dans une version souple noir et blanc à 200 exemplaires comme carte de vœux de François Corteggiani en 1988, avec une splendide couverture quadri de Claude Marin. Une nouvelle aventure, Le manoir des potirons, fut ensuite scénarisée mais jamais dessinée. Cette série pétillante restait donc sans lendemain ni reprise, jusqu'à aujourd'hui où Mosquito nous offre ce récit inaugural ressuscité, cartonné et en couleurs !

Le jeune lecteur trouvera dans cette aventure les ingrédients classiques du genre, avec course-poursuite échevelée ponctuée de plongeons dans la Seine, carambolages d'automobiles d'époque, passage secret dans le cimetière Montparnasse, et toute une théorie de méchants et de seconds rôles indispensables et réussis. Les deux héros principaux rappelleront aux lecteurs plus âgés une kyrielle d'illustres prédécesseurs. Léontine de Poulay en Gelet est une synthèse de Prudence Petitpas, Tartine Mariolle et Virgule de Guillemets, la pétulante aristo de Greg, dont Corteggiani est un digne héritier. Bombardon le gros costaud à rouflaquettes est un faire-valoir qui tient d'un docteur Watson prolétarisé et d'un professeur Mortimer des fortifs. Quel plaisir de découvrir un reporter nommé Louis-Ferdinand Panzani, un agent Kox, et une serveuse qui se voit commander "Adèle ! Un blanc-sec !". Ces multiples références renvoient aux classiques de l'énigme urbaine menaçante, du S.O.S. météores de E.P. Jacobs à l'univers parisien et feuilletonesque de Jacques Tardi. Ici, pas le temps de s'ennuyer, l'intrigue file à cent à l'heure et le dessin nerveux et suggestif de Pierre Tranchand est en phase cinétique avec l'action trépidante, sans omettre l'indispensable décor Art Nouveau.

Cet exercice n'a nulle autre prétention qu'un pur divertissement et la bonne humeur des dialogues humoristiques. Bref, voici un " opus qui marche " ! (Que l'on me pardonne ce jeu de mots final, dicté par mes nombreuses lectures de Greg et Corteggiani...et mes non moins nombreuses virées au Marché aux Puces)

Moyenne des chroniqueurs
7.0