En attendant que le vent tourne

L ors de leurs vacances d’été, Xavier, Pierrot et Florentin décident d’entreprendre un projet démentiel dans la forêt : la construction d’une cabane ! Une vraie cabane en bois, perchée dans un arbre, avec un grand fauteuil au centre et tout et tout. Malheureusement, peu de temps après l’avoir terminée, ils retrouvent leur cahute complètement saccagée. Il faut se venger et les trois petits garçons ont vite fait de trouver les coupables idéaux dans la bande rivale, composée des affreux jumeaux Brossard et de la charmante Lucie.

Sous des airs enfantins, les frères Guinin nous offrent une jolie fable philosophique sur l’art de vivre ensemble. Pourquoi ressent-on de la colère ? Pourquoi éprouve-t-on le besoin de se venger ? Pourquoi est-ce qu’on tombe amoureux ? C’est quoi l’amitié ? Autant de questions existentielles auxquelles les auteurs répondent avec finesse sans porter de jugement et sans apporter une morale indigeste qui gâcherait l’ouvrage. Pour autant, l’album ne se destine pas forcément aux enfants. Les adolescents devraient y trouver leur bonheur et il est recommandé de leur faire découvrir mais, même si les personnages et le récit se raccordent à l’enfance, les adultes seront probablement plus réceptifs à la douce mélancolie qui enrobe cette oeuvre. Chacun retrouvera les saveurs et odeurs de l’époque plus ou moins lointaine de ses jeunes années.

Les couleurs pastel et la fausse simplicité graphique sont en contraste avec la cruauté des évènements et des protagonistes, ce qui donne une réelle profondeur à l’histoire. En alliant douceur et amertume, cette bande dessinée parvient à trouver l’équilibre parfait pour susciter l’émotion et décrire avec justesse le paradoxe de l’enfance qui oscille constamment entre une naïveté touchante et une atroce barbarie. D’une rare fraîcheur et d’une grande sensibilité, ce premier album se révèle vivifiant et finalement plutôt réconfortant. De plus, le scénario est bien ficelé et, grâce à une tension dramatique bien maîtrisée, le lecteur se laisse emporter avec plaisir jusqu’au coup de théâtre final.

En attendant que le vent tourne entre directement dans la cour des grands, chapeau !

Moyenne des chroniqueurs
8.0