Lo 1. Lo

E n adaptant très librement la pastorale de Longus, Lucie Durbiano orchestre un habile marivaudage, tout en poursuites et en quiproquos, sous la férule d’une matrone névrosée en la personne de Diane, la déesse chasseresse. Voici Lo, nymphette menue, s’éprenant de Daphnis, éphèbe puceau, qu’elle va s’attacher à poursuivre de ses assiduités. Mais le jeune pâtre n’a d’yeux que pour Chloé, la jolie bergère qu’il ne sait comment trousser…

Ah les jeux de l’amour et du hasard ! Entre émoi amoureux et éveil à la sensualité, l’écriture se teinte volontiers d’une irrévérence douce-amère et d’une drôlerie un peu perverse. C’est que Lucie Durbiano aime rien moins qu’à varier les registres, et le conte initiatique d’emprunter plus souvent au théâtre de boulevard qu’à la tragédie grecque. L’équilibre est évidemment fragile, mais l’auteure parvient à ne jamais perdre le fil et à maintenir à flot un récit qui manquait parfois de sombrer dans le vaudeville.

C’est qu’il était risqué, entre bacchanale et libations orgiaques, de s’appesantir sur les amours contrariées d’une nymphe abandonnée aux satyres et à quelques divinités inconséquentes obnubilées par la chose. Le pari est pourtant relevé haut la main. La mise en scène, facétieuse, pleine de fraicheur et de malice, est servie par une langue admirable. Les anachronismes sont assumés et les répliques sonnent juste. Et puis, il y a cette délicieuse ligne claire, ce trait faussement naïf porté par de simples aplats de couleurs vives, une imagerie cocasse, où les thirses sont enlacées de couronnes de lierre, de ceps de vigne et de grappes de raisin. D’aucuns chercheront d’ailleurs à y débusquer l’hommage à Superman, voire quelque emprunt à Titien, Rubens, Vermeer ou Bouguereau.

Et parce qu’on ne badine pas avec l’amour, s'il est bien une lecture qui s'impose, c'est celle de cette symphonie pastorale en Lo majeur !

» A lire aussi, la chronique de Orage et désespoir et celle de Trésor.

Moyenne des chroniqueurs
5.5