Monsieur Personne - The Nobody

J eff Lemire a un goût certain pour les petites villes. Il y dépeint, à travers la vie de braves gens, des histoires de village, où chacun se connaît et s’épie, des sagas familiales rurales, où les secrets se mêlent aux remords, aux regrets, à la solitude. Le tableau qu’il brossait d’une petite communauté de l’Ontario dans la trilogie Essex County y était d’ailleurs relativement bucolique. La campagne y était décrite comme un refuge, un havre de paix loin de l’agitation frénétique des centres urbains. Et pourtant, non loin de là : Large Mouth, 754 âmes. L’arrivée d’un étranger, recouvert de bandages de la tête aux pieds, venu chercher un peu de tranquillité après un grave accident, va pourtant révéler les peurs et la paranoïa d’une petite bourgade de pêcheurs. Ce, jusqu’à la chasse à l’homme, jusqu’au drame.

Jeff Lemire, en s’emparant du personnage créé par H. G. Wells, s’amuse des contraires et prend le contre-pied de la saga qui l’a révélé à la critique. Son Monsieur Personne est une réinterprétation réussie d’un classique, qui emprunte tout à la fois aux ambiances lynchiennes et à la tradition du pulp. Évidemment, à la lecture parallèle d'Essex County, il pourrait lui être reproché un goût de trop peu. Ce serait oublier que cet album en constitue en vérité l’indispensable complément.

» A lire, la chronique de Essex County par A. Perroud.
» Le blog de Jeff Lemire.

Moyenne des chroniqueurs
6.8