Manioka 1. Manioka

U n jeune dealer trafique en périphérie de AFU-RA, une ville dont l’accès lui est interdit. L’espérance de vie est faible dans ce ghetto et sa rencontre avec un membre des Iron Monkeys, sorte de justiciers issus de combats à mort, risque de précipiter les choses... Il croit sa dernière heure arrivée, mais lorsque les premiers projectiles l’atteignent, il se met à muter. Il se réveille le lendemain sur les lieux de l’affrontement, son maillot constellé d’impacts de balles de gros calibre et indemne ! Manioka est né.

Dénonciation des inégalités, des violences sociales, critique d’un pouvoir autoritaire et répressif qui délaisse les plus faibles, Manioka sonne comme un pamphlet contre notre société. Il dépeint une sorte de « no future » où la fracture sociale n’est plus une notion ou un constat politique mais une fracture urbaine, une séparation physique matérialisée par un mur d’enceinte et un dôme infranchissable surmonté de mitrailleuses. Nkodem, scénariste et dessinateur de ce one-shot, entraîne le lecteur sur les pas d’un petit dealer au quotidien peu reluisant, parmi une population composée d’exclus condamnés au crime pour subsister.

Ce qui frappe dès les premières pages, c’est la narration en voie off qui donne l’impression de parcourir l’album sur un fond de musique Hip Hop. Il est d’ailleurs possible de compléter la lecture par l'écoute d'une bande sonore disponible sur le profil MySpace de Nkodem.
Vient ensuite l'ambiance hostile et oppressante rendue par l'omniprésence de bruits de ventilateurs et une colorisation neutre et froide. Graphiquement réussi et fortement influencé par Akira de Katsuhiro Ōtomo (certaines scènes rappellent celles de la mutation de Tetsuo, du cataclysme provoqué par Akira ou encore de l’intronisation dans Néo-Tokyo), l’album faillit cependant du fait de son contenu trop militant pour un récit de science-fiction mais peut-être trop timoré pour un pamphlet social. C'est avec cette limite que le lecteur risque de devoir composer lorsqu'il cherchera à s’immerger totalement dans l’histoire et à adhérer aux messages qu’elle véhicule.

Atypique et esthétiquement soigné, ce premier album pâtit cependant d'un scénario insuffisamment développé pour être efficace. Il n'en reste pas moins que l’auteur est prometteur, il devrait « briller tellement, qu’il faudra des Ray Ban pour pouvoir lui parler ».

Moyenne des chroniqueurs
5.0