Holmes (1854/†1891?) 2. Livre II : Les Liens du sang

16 avril 1844. L’effervescence règne à Dorval où les sœurs Sherringford s’apprêtent à faire la connaissance de Siger Holmes, le promis d’Emilie. 2 juin 1891, dans le Yorkshire. Poursuivant leurs investigations, Wiggins, Watson et son épouse, arrivent devant la demeure des Holmes nourris de l’intention de rencontrer les parents du défunt détective.

Esprit brillant, artiste, mélomane mais aussi personnage fragile, misogyne et cocaïnomane, qui était vraiment Sherlock Holmes ? Un enquêteur hors pair ? Un mystificateur ? Les circonstances de sa disparition et les contradictions que recèlent les diverses informations qu’il a pu recueillir posent question à Watson. Quelque chose ne colle pas entre ce qu'on lui dit de son ancien ami et l’être dont il a partagé, un temps, le logement. Il lui faut en savoir plus sur l’homme, sur son passé, sur sa personnalité, sur sa famille, sur ce qui l’a construit et peut-être détruit.

Le ton est vivant, la construction intelligente. Si Watson et Wiggins endossent le rôle de fin limier, les procédés qu’ils utilisent, observation et déduction, prise de distance avec les convenances pour les besoins de l'enquête, rappellent ceux du détective. Quelques indices sont semés, préparant des révélations à venir dans les tomes suivants sur le rôle joué par divers protagonistes. D’autres établissent un lien entre la personnalité de Sherlock Holmes et celle des membres de sa famille. Sur ce dernier point, il est possible d’envisager que Holmes ait pu hériter de la sensibilité artistique et de l’imagination fertile de sa mère, elle que la contemplation et la totale appropriation d’une œuvre picturale pouvait submerger d’émotion. Mais aussi, pourquoi pas, de l’impétuosité et de l’irritabilité de son père.
L’habileté avec laquelle Luc Brunschwig arrive à fondre sa propre création dans un récit qui épouse les fondements de l’œuvre originelle, y fait référence (lien de parenté avec Horace Vernet, pratique du violon), reprend et respecte les caractéristiques du héros, donne une réelle crédibilité à la démonstration.

Sur le plan du graphisme Cecil joue les orfèvres. La différenciation des bases de couleurs, ton sépia pour la période supposée antérieure à la rencontre entre Watson et Holmes, variations de gris pour ce qui suit, permet de bien identifier l’époque à laquelle se déroulent des séquences. La bichromie permet également de bien valoriser le texte. Sans que cela nuise à rendre la minutie du travail de Cecil. La précision du trait dans le dessin des corps, qu’ils soient humains ou bien animaliers, les détails des décors, le jeu des éclairages en extérieur et en pénombre, la qualité de la retranscription de la sensation de mouvement et de vitesse lors la course des charrettes, sont impressionnants. Il en va de même de l’effet produit par l’apparition des couleurs sur le tableau narrant une scène de bataille dans lequel les personnages semblent communiquer avec celle qui deviendra la mère de Sherlock Holmes. A ce niveau, la perception est si surprenante et si absorbante que l’on s’attend à ce qu’il se produise un évènement du genre de celui vécu par Giovanni dans le tome 3 des Cités obscures de Benoît Peeters et François Schuiten. Enfin, que dire de la superbe couverture ! Elle ne peut pas laisser indifférent, elle résume bien le temps fort de l’album, et il fallait l’oser ... Cecil l’a fait.

Il ressort de la lecture du tome 2 de Holmes une sensation de qualité intense. Qualité narrative, qualité artistique, et une forme d’élégance. Mais la médaille a son revers. L’ouvrage refermé, la frustration est immense. Deux chapitres de 13 et 19 planches, c’est trop court !

Lisez la chronique du tome 1 : Holmes

Consultez la preview du tome 2 : Holmes 2