La cellule (Long/Costes) La cellule

S imon et Anne formaient un couple heureux, sans histoires, comme il en existe beaucoup. Elle est trompettiste, lui chercheur dans un laboratoire. Or, un beau jour, Anne n'en peut plus de cette relation dans laquelle elle se sent très à l'étroit, étouffée. Elle décide donc de partir, laissant Simon, seul, face à sa folie.

Imaginée par le duo Fabienne Costes et Guillaume Long, La Cellule a l'apparence d'une très banale histoire de rupture. La différence vient du traitement volontairement "fantastique" souhaité par les auteurs. Ils ne cherchent pas tant à décrire les raisons qui ont conduit à cette décision brutale, qu'à relater la manière dont l'un des protagonistes évolue au fil du temps. Ils décrivent la lente agonie psychologique de Simon, qui n'arrive pas à faire face et semble perdu, privé ce cette moitié sur laquelle il pouvait s'appuyer pour avancer dans la vie.

Cet album laisse une impression mitigée. Ce sentiment est principalement dû à un découpage très confus où les transitions manquent de clarté, l'histoire passant d'un sujet à l'autre sans permettre d'en comprendre véritablement les raisons. L'usage de l'ellipse et du passage d'une séquence à l'autre sans tout montrer ne densifie pas le mystère ou l'intrigue. Au contraire, le manque de cohérence et de linéarité, a priori pas nécessaires, se fait sentir, voire regretter. Le comportement et le mode de raisonnement de Simon sont heurtés, le récit l'est aussi. Soit.

Mais les délires de Simon, trop surréalistes, nuisent au récit qui aurait gagné à miser sur plus de simplicité. Dès lors le personnage principal, ni drôle ni à plaindre, laisse indifférent. L'identification qui permet habituellement au lecteur de s'approprier le récit, de se sentir proche des évènements vécus par les protagonistes et éventuellement de trouver un écho dans sa propre existence, n'opère pas. Et le métier particulier de Simon (tout le monde n'est pas chercheur) ne semble y être pour rien.

Les choix graphiques de Guillaume Long pour illustrer ce qui est apparenté à un drame soufflent le chaud et le froid. Les pages plutôt banales alternent avec de véritables trouvailles visuelles comme cette double page où Simon est au balcon regardant Anne s'éloigner où le temps semble s'étirer de cases en cases. A noter également, quelques temps plus tard, la rencontre entre les deux avec un dialogue volontairement ordinaire où seules les tasses à café sont représentées. Ces deux exemples ne sont pas les seuls et ces idées audacieuses rythment l'ensemble de l'album. La mise en couleurs est à l'image du scénario, plutôt sombre pour illustrer la longue dépression de Simon.

Les auteurs ont pris le risque, pour aborder le sujet difficile de la séparation et de la dépression, de de faire cohabiter l'aspect dramatique avec une touche de fantastique. Le mélange est loin de convaincre et laisse plutôt indifférent tant il est facile de ne pas se sentir solidaire de Simon au moment de l'accompagner dans son naufrage affectif et intellectuel. D'ailleurs, parce qu'ils ne livrent pas toutes les clés au lecteur à l'approche d'un dénouement plus ou moins précipité, il est possible de se dire que les auteurs n'en demandaient peut-être pas tant.

Moyenne des chroniqueurs
4.3