KGB 2. Le sorcier de Baïkonour

D ’étranges phénomènes sont apparus au Kremlin, entraînant la disparition du chef du KGB. Des agents dotés de pouvoirs étranges sont sur la piste d’un mystérieux docteur qui dirige actuellement les opérations à Baïkonour, où l’URSS compte bien damer le pion aux Etats-Unis dans la conquête spatiale. Mais sur place, d’autres événements inexplicables se produisent…

Le simple titre de cette série contient déjà en lui-même une puissante force évocatrice qui entraîne à elle seule le lecteur dans un imaginaire peuplé de mystère, de violence, de secret. Mais Valérie Mangin ne s‘est pas contentée d’un bon titre : les couvertures des deux premiers volets constituent presque une leçon de marketing BD. Trois lettres « magiques » jaunes sur un grand aplat rouge vif, avec une jeune femme à demi-nue sur un pentacle sanglant devant le Kremlin pour la première, une sorte de Raspoutine muni d’une seringue encadré par une croix gammée et le célèbre couple faucille-marteau sur la seconde. Si l’objectif d’une couverture est d’attirer l’attention, difficile de faire plus fort.

Il est rare que des couvertures racontent autant d’histoires, juste à l’aide de quelques symboles. Le graphisme sobre et clair de Kerfriden, souligné par des couleurs peu nuancées, y contribue d’ailleurs largement. Le paradoxe, c’est que dans ce registre, elles sont probablement plus efficaces que les albums eux-mêmes. Valérie Mangin est coutumière des intrigues complexes, et celle-ci ne fait pas exception à la règle. Exploitant pleinement l’imaginaire associé aux services secrets communistes, elle y ajoute un ingrédient inattendu, le fantastique. L’idée n’est pas inédite (Cf. Blake et Mortimer ou plus récemment le très bon Je suis Légion), mais le mélange des genres nécessite un certain doigté, notamment dans les dialogues, sous peine de friser rapidement le ridicule.

Le premier tome était parfois bancal, la faute à des personnages tantôt outranciers, tantôt insignifiants. Dans celui-là, l’astuce consistait à entretenir le suspense par l’absence du mystérieux Dr Von Ausch à l’origine des mystérieux phénomènes entrevus au Kremlin. A l’inverse, dans cette seconde partie, celui-ci occupe une place centrale et, fatalement, écrase complètement des personnage secondaires déjà peu convaincants. La part de mystère s’évanouit également très vite, puisque les phénomènes surnaturels font désormais partie du décor sans qu’il soit nécessaire que les protagonistes s’en inquiètent. En arrière-plan, les sous-sols du Kremlin font place à la base de Baïkonour et Youri Gagarine succède à Nikita Krouchtchev en « guest-star ». Discret, lisible, le dessin ne change pas grand chose à l’impression d’ensemble, les couleurs parfois criardes s’avérant finalement bien moins surprenantes que certains rebondissements.

Au final, le rôle du KGB dans ce curieux méli-mélo semble bien secondaire. La série aurait tout aussi bien pu s’appeler CIA ou Stasi (DGSE, ça fait quand même un peu ringard), ce que semble confirmer un final qui bascule totalement dans le fantastique. Dès lors, on se demande s’il était bien opportun d’interpeller les amateurs d’espionnage avec un tel titre, quitte à les perdre définitivement dans ce deuxième tome qui n’a plus grand chose à voir avec ce registre. Pour les amateurs de surnaturel, il est encore tôt pour se faire une véritable idée, trois tomes restent à venir.

Moyenne des chroniqueurs
4.0