L'Île au trésor (Simon) 1. Volume 1

Q ui ne connaît pas cette merveilleuse histoire, inspiratrice de tous les récits de grande aventure et de piraterie ? Jim Hawkins, un jeune garçon anglais se retrouve en possession d’une carte qui indique l’emplacement du trésor du capitaine Flint, un célèbre pirate, sur une île des Antilles. Il s’en ouvre à des notables de la ville qui décident aussitôt d’armer un navire pour retrouver le trésor. L’équipage est recruté sur le port de Bristol, parmi lesquels Long John Silver, maître-coq à la jambe de bois, qui se prend d’affection pour le jeune Jim. Peu à peu, il s’avère qu’une partie des marins ne sont autres que des anciens pirates, bien disposés à s’emparer coûte que coûte du butin…

L’année 2007 a été celle des adaptations, notamment via cette collection Ex-libris à l’intérêt variable mais qui héberge notamment l’excellent Robinson Crusoë signé Christophe Gaultier. Dernièrement, Robert Louis Stevenson a été particulièrement à l’honneur, puisque son chef-d’œuvre Le maître de Ballantrae a fait l’objet d’un magnifique diptyque par Hippolyte tandis que Dorison et Lauffray imaginaient de nouvelles aventures pour ce même Long John Silver, héros de l’Ile au trésor. Malgré la caution de Chauvel, scénariste notamment d'Arthur et Ce qui est à nous, cet album n’est hélas pas à ranger dans la même catégorie que ces dernières réussites.

Un comble, car s’il est un récit propice à une adaptation épique et imagée, si un seul roman de Stevenson devait se trouver ainsi retranscrit en bande dessinée, c’est bien celui-ci, tant il constitue une sorte de mode d’emploi du récit d’aventure. Tout ce qui s'y trouve semble pourtant absent de ce premier tome, comme si à force de paraphraser l’auteur, Chauvel n’avait réussi qu’à alourdir l’histoire en la privant de tout son souffle. Certes, la première partie est bien la moins spectaculaire et, quand on connaît la suite, ne fait que susciter l’impatience d’un lecteur pressé de voir le navire prendre la mer. Mais était-il besoin dans ce cas d’en faire pratiquement tout un volume ? Au prix d’un ennui souvent pesant, fallait-il conserver le style littéraire de la narration, tous ces textes qui ralentissent la lecture, et dont le style contraste avec un dessin particulièrement naïf ? Est-ce un carcan lié à un supposé cahier des charges de la collection Ex-libris ?

Le dessin justement, est l’autre grande déception de cette lecture. Sans vouloir contester le talent de Fred Simon, il a la malchance qu’un Lauffray ait su, juste avant lui, insuffler une image forte à ce thème qui épouse complètement l’imaginaire décrit par Stevenson. L’ambiance sombre et fantastique du dessinateur de Prophet n’était pas forcément un passage obligé, mais elle a cette ambition, cette envergure, ce souffle qui encore une fois fait défaut à cet album. Très timide, d’un trait sans relief jusque dans des tons pastel sans éclat, c’est l’impression qui ressort, même même en s'épargnant la comparaison avec d'autres transpositions.

L’adaptation d’une œuvre populaire n’est pas forcément l’assurance d’un grand album, cette BD en fait malgré elle la démonstration. Il est des mythes auxquels il vaut mieux ne pas toucher, au risque de les dévaloriser : pour beaucoup, L’île au trésor fait partie de ces livres magiques dont la découverte forge pour toujours le goût des belles histoires. Il serait réellement dommage de l’aborder de cette manière, à moins que les auteurs ne redressent sérieusement la barre pour le prochain volume.

Moyenne des chroniqueurs
5.7