Aarib 1. Les yeux de Leïla
F
rançois Le Guennec est un jeune écrivain, spécialisé dans la littérature populaire et exotique destinée aux magazines féminins. Il décrète un jour que romancer la vie dans le désert africain ne peut se faire si l’on n’a jamais pu l’observer soi-même, et le voilà parti pour le Maroc ! Le trajet, en train puis en bateau, sera pour lui l’occasion de se lier d’amitié avec la charmante Camille. Le père de la jeune femme semble ravi de lui accorder son aide, et François peut rapidement partir dans le désert, faisant tout d’abord halte dans une garnison perdue au milieu de nulle part, mais dont le capitaine Guillaume Lagardère sera d’une compagnie aussi agréable qu’enrichissante. Puis vient le grand moment : François part à dos de chameau pour rejoindre le campement des Aarib, une tribu nomade au sein de laquelle il trouvera une nouvelle famille, un nouvel art de vivre et, qui sait ?, l’amour...
Jérôme Heydon produit ici son premier album, une aventure initiatique mettant un Français du début du XXème siècle face à un univers inattendu et profondément chaleureux. Les couleurs sont pour beaucoup dans le charme dégagé par les planches de ce volume, chaudes et riches. Le dessin en lui-même est d’une rigueur à toute épreuve dès lors qu’il s’agit des décors, mais les personnages en pâtissent malheureusement, et deviennent aussi figés que des statues. Il est cependant évident que le style s’affermit page après page, et les qualités esthétiques de ce livre sont porteuses de belles promesses pour les prochaines œuvres de leur auteur.
Quête initiatique teintée d’exotisme et d’une naïveté légèrement surannée, voici une histoire guère palpitante, mais qui évoque à merveille les grands espaces recherchés par le héros, et parvient à rendre compte de la chaleur humaine dégagée par une tribu qui refuse de se laisser dicter sa conduite par le protectorat français. Les amateurs d’action palpitante en seront pour leurs frais, c’est à une véritable visite guidée que les convie l’auteur, avec ses belles images dignes d’une carte postale et la bienveillance parfois mielleuse de l’ensemble des personnages envers le naïf de service, utilisé ici pour transporter des armes. Cet argument prétendument politique prête à sourire tant il paraît dérisoire face aux découvertes des sentiments humains de François, mais il semble qu’il doive prendre de l’importance dans les volumes à venir, la fin étant atrocement frustrante pour le lecteur.
Malgré une narration lente, cet album est plaisant comme un joli livre d’images. Gentiment raconté, joliment dessiné, un ouvrage pétri de bonnes intentions, mais dont les dernières planches laisseront de mauvais souvenirs à ceux qui n’aiment pas attendre pour connaître la fin d’une histoire…
6.0