Merci Patron

D ans un village au Portugal, Aida, une vielle dame mélancolique, réclame chaque jour au « patron » une pièce en mémoire de sa fille. Une enfant, intriguée par ce rituel, la questionne. Tout cela remonte vingt ans en arrière : Aida vivait alors sur les terres du « patron » avec sa fille Anita, jeune, belle, innocente…

En feuilletant Merci Patron de Rui Lacas, on s’imagine avoir entre les mains une œuvre légère, pour un jeune public, construite « à la Disney » avec ses quelques passages tristes ou émouvants avant sa conclusion heureuse. Une impression tout à fait confirmée par la lecture du premier quart : Anita est joyeuse, pleine de vie, liée d’amitié avec Ernesto le poney, le tout sur des dialogues très enfantins et des dessins tout en rondeurs. Un côté très mièvre un peu agaçant mais le style a son public.

Toutefois, au fur et à mesure que l’histoire progresse, la forme ne change pas mais les propos s’assombrissent pour évoquer des abus sexuels du « patron » envers la candide Anita, le tout illustré de façon très expressive. C’est choquant. Il semble assez maladroit d’utiliser un tel traitement pour aborder ce thème particulièrement fort et pénible. On ne sait plus du tout à qui s’adresse cet album, beaucoup trop cru pour des enfants et trop niais pour des adultes.

Malgré un manque de maturité assez flagrant, le jeune auteur portugais Rui Lacas a un style qui n’est pas déplaisant. Malheureusement, il passe complètement à côté de ce sujet extrêmement délicat. Mieux vaut se tourner vers le poignant Pourquoi j’ai tué Pierre, déjà incontournable.

Moyenne des chroniqueurs
3.0