Le ciel au-dessus de Bruxelles 1. [avant]...

E rwin Engell Stern est ressortissant du royaume de Kazarie, un minuscule royaume au bord de la Mer Noire où cohabitaient juifs et musulmans, et qui a été détruit par Staline. Fadia est "née en Belgique d'origine marocco-babylonienne. Une beurette, une bâtarde, une "zinneke". Une vraie européenne...". La rencontre, en marge d'une manifestation pour la paix, de ces deux êtres si semblables et que pourtant tout sépare va faire vaciller les certitudes de l'un comme de l'autre.

Hislaire, Yslaire, Sylaire, Bernar Yslaire... A chaque série, l'homme change de nom, mais pas seulement. Il change d'identité, de style, de personnalité, de vue sur le monde. Yslaire grandit, mûrit, et avec lui ses personnages, aussi dissemblables que possible, et pourtant tous reliés par une même quête d'idéal, celle qui pousse Bidouille à monter en haut d'un immeuble, Julie à essayer de se crever les yeux ou Erwin à violer Fadia. Oui, dans l'univers éthéré du Ciel au-dessus de Bruxelles, une certitude : ce viol qui, même si le "héros" tente de le justifier par la libération de la jeune femme, laisse un goût amer dans la bouche, fait de gêne et de mauvaise conscience. Cet acte charnel en entraînera probablement beaucoup d'autres dans la suite de l'album, si l'on en croit le papillon omniprésent, symbole habituel de la théorie de Lorenz dite "effet papillon". Yslaire souhaiterait-il faire une illustration de ce principe ?

Cependant l'histoire, pour éthérée qu'elle soit, manque d'un petit quelque chose pour éveiller totalement l'intérêt du lecteur. On joue avec le graphisme, les couleurs, les polices... et entre temps il ne reste que peu de matière. Doit-on se préparer à un deuxième tome d'une densité impressionnante, ou au même style de vacuité fort esthétique ? Parce que bien sûr, graphiquement, il n'y a rien à redire. Le dessin est superbe, les ambiances fortes, la mise en page très intelligente. On retrouve la "patte" de l'auteur de XXème ciel.com, les rondeurs des personnages de Sambre... A travers de nombreux clins d'oeil, il nous montre d'ailleurs qu'il est loin de renier ses séries précédentes. Mais on bute toujours sur ce manque de contenu qui fait qu'à part balayer rapidement les grands sujets de société que sont la Shoah et les attentats-suicide, cet album reste, peut-être pas vide, mais en tout cas peu consistant.

Une légère déception avec cet album dont certains espéraient une histoire forte. Mais l'auteur ne s'est pas totalement éloigné de ses amours de jeunesse, promettant une suite à Sambre juste après Le Ciel au dessus du Louvre annoncé pour la rentrée 2006. Espérons que ces deux albums sauront faire retrouver aux fans leur enthousiasme.