Wayne Shelton 5. La vengeance

S i Wayne Shelton est encore en vie, c'est que Tran a bondi pour recevoir à sa place un coup de couteau fatal. Peu après leurs retrouvailles, le jeune Viêt s'est sacrifié pour protéger celui qu'il considérait comme son père adoptif. Inutile de dire que Shelton est plus déterminé que jamais à retrouver Hooker, chef de la bande de pirates indonésiens qui porte la responsabilité de tout cela, et qu'il veut lui faire payer ses crimes au centuple. Vengeance !

Initiée par Jean Van Hamme, la série partait sur une idée intéressante : plutôt qu'un énième héros au sommet de sa forme, il s'agissait de raconter les aventures d'un mercenaire quinquagénaire, spécialisé dans les interventions à haut risque. Le personnage, cela va de soi, porte une cinquantaine fringante : grand séducteur de dames, ses compétences d'aventurier doivent toutefois plus à son expérience et à ses qualités d'organisation qu'à ses capacités physiques. Mais Van Hamme s'est très vite lassé de ce héros. Après une histoire en deux tomes, puis un troisième volume co-écrit avec Thierry Cailleteau, il a définitivement transmis les rênes de la saga au scénariste d'Aquablue.

Ne les ayant pas encore vécues, Cailleteau ne partage peut-être pas l'opinion de son prédécesseur quant aux vertus de la maturité. Alors il a comme rajeuni le héros (pour vous changer, changez de Shelton !), qui est devenu très, très physique. Certes, il n'a plus trente ans : après avoir sifflé une bouteille de whisky, il a un peu mal aux cheveux, qu'il porte grisonnants. Et quand il saute par la fenêtre du deuxième étage, au lieu de s'en tirer avec quelques bleus comme au bon vieux temps, il se fêle quelques côtes... Mais, pffou, bagatelle : on se bagarre très bien avec des côtes fêlées ! Sur le plan de la morale, en revanche, Wayne Shelton a beaucoup régressé. On perd vite le compte des hommes de main qu'il dégomme, soit en faisant usage d'armes à feu, soit en les défenestrant, soit en provoquant des accidents et explosions spectaculaires. Et quand il épargne l'existence d'un "boss" pour le remettre aux mains de la justice, il s'en excuse auprès du lecteur (forcément déçu par cette clémence indésirable) en déclarant : « Je ne sais pas si ce pays a aboli la peine de mort. Je te laisse la surprise ! » Pour info, le pays en question étant le Vietnam, la réponse est non. Belle mentalité.

Flingage et racolage à tous les étages, situations et dialogues consternants, scènes de bagarre composées dans le style des "petits formats" des années 70... Comment Cailleteau et Denayer ont-il pu avoir envie de produire un travail aussi peu ambitieux ?

Moyenne des chroniqueurs
3.6