Tisseuse
E
thel et sa grand-mère sont les gardiennes d'un puits magique qui permet de communiquer vers un autre monde, miroir du leur mais avec sept ans de décalage vers le passé. Les deux femmes ont ainsi pour tâche de recevoir et choisir les vœux de celles et ceux qui voudraient modifier leur existence en envoyant un message aux tisseurs, de l'autre côté. Leur rôle est de réceptionner les demandes et d'agir pour changer le cours des événements. À la mort de sa grand-mère, Ethel doit prendre sa suite mais fait le choix de plonger au fond du puits pour aller voir de l'autre côté.
Léna Canaud construit son récit intelligemment. La première partie pose les enjeux, le lecteur s'attache aux personnages jusqu'au tournant du départ vers l'autre monde qui relance l'histoire avec de nouveaux sujets. La question principale qui est posée, assez classique, est de voir quels sont les impacts d'un changement de décision sur notre existence. Mais l'autrice ne s'arrête pas là et propose des réflexions sur l'attachement et la responsabilité de chacun sur sa capacité à influer la vie de ses proches. Une déception, cependant : les deux univers liés interagissent finalement très peu, comme dans la vie où personne ne peut évidemment communiquer en dehors du temps mais doit se contenter de seulement porter en soi ses regrets et ses espoirs.
Le trait et les couleurs pastels donnent le ton du récit, malgré certains thèmes durs. Ce choix graphique permet de conserver une certaine douceur. Les relations entre les personnages sont à l'avenant et démontrent beaucoup de bienveillance. Une bonne idée est d'avoir attribué une palette de couleurs propre à chaque époque, le futur en camaïeu de bleu et le passé de sépia. Cela autorise la variation régulière d'insertions d'éléments bleus dans le monde sépia, comme des souvenirs du futur, jolie trouvaille à la fois graphique et narrative.
Une BD intelligente qui traite de sujets complexes avec finesse et qui présente une grande cohérence entre l'histoire et le dessin très appréciable.
6.0


