Paul - La résurrection de James Paul McCartney (1969-1973)
L
ondres, 1969. Depuis quelques années, l’auteur de Hey Jude s’est imposé comme moteur créatif des Beatles. Les disques se vendent par millions et les fans adulent les quatre garçons dans le vent. Le bassiste, autoritaire et perfectionniste, n’a visiblement pas su entendre les notes discordantes de ses trois acolytes. Une fois la rupture consommée et pas tout à fait digérée, il se reconstruit professionnellement, musicalement et personnellement. Ses premiers disques sont jugés durement par la critique et le public le perçoit comme le mouton noir du quatuor.
Paul – La résurrection de James Paul McCartney (1969-1973) est le livre d’un aficionado. Hervé Bourhis a d’ailleurs déjà publié Le petit livre des Beatles et scénarisé Retour à Liverpool.
Le projet se concentre sur une période teintée de litiges avec les copains, de dépression, de retour aux sources (nouvelle formation et spectacles improvisés), puis d’un succès retrouvé. La structure, classique, apparaît calquée sur celle de tous les contes : un héros (Paul McCartney, Rocky Balboa, Le comte de Monte-Christo, Charles de Gaule, etc.), subit une défaite cinglante, vit une traversée du désert, se relève les manches et renoue avec le succès.
Tandis que le charismatique John Lennon hausse le tempo en entreprenant une croisade messianique pour la paix et qu’il vibre à la célébrité, son compère reste fidèle à sa mélodie intérieure. L’album le présente d’ailleurs comme un créateur audacieux et sincère, ayant le cran de se réinventer, sans revendiquer l’héritage de son célèbre groupe. L’auteur admire visiblement le chanteur, mais évite de sombrer dans l’hagiographie. Il rappelle qu’il a imposé des chansons médiocres (Ob-La-Di, Ob-La-Da, Maxwell’s Silver Hammer), alors qu’il dédaignait le travail de George Harrison et souligne qu’il a négocié des ententes avantageuses, sans en faire profiter ses collègues. S’ajoutent la dépression et l’alcoolisme.
Le dessin est une réussite. Tantôt caricatural, tantôt réaliste, mais généralement relâché, il traduit l’instabilité d’un artiste qui se cherche, sa perte de repères et sa confusion. Bien qu’il demeure aisément reconnaissable, le visage du héros fluctue d’une vignette à l’autre. Un peu comme s’il se révélait finalement trop banal, alors que les lunettes et le nez aquilin de John Lennon lui assurent une reconnaissance instantanée.
Les couleurs, parfois aussi stridentes qu’un riff sous acide, se veulent un clin d’œil à l’ère psychédéliques. Il y a toutefois là une fausse note, puisque, pour le protagoniste, le début des années 1970 correspond plutôt au retour à la terre.
Une bande dessinée bien orchestrée, pour redonner au musicien sa juste place dans la symphonie du rock.
7.0
