Cœlacanthes 1. Noa

D aphné Collignon a quitté le Rêve de Pierres d’Isabelle Dethan pour nous livrer un récit intimiste et en partie autobiographique. Pour son premier album en tant qu’auteur complet, elle aborde un univers qu’elle connaît bien, celui de l’Art, sous les traits de Noa Winter. Cette peintre trentenaire dont la notoriété n’est plus à faire, est tiraillée entre sa passion, les relations ambiguës qu’elle entretient avec son amie Magda et Juan, son ancien amant qui refait surface après trois ans d’absence. Ce retour la perturbe d’autant plus que son prochain vernissage approche et que Magda n’est pas là pour la soutenir. Alors, cloîtrée dans son appartement, Noa sent monter en elle un appel étrange, ses nuits s’agitent entre rêves et visions…

Daphné aurait-elle pris son envol trop vite ? Alors que sa précédente série avait conquis très rapidement, Cœlacanthes se révèle plus difficile d’accès. On sent bien que l’auteur s’épanouit avec cet album, aussi bien au niveau du scénario que du dessin, mais le propos est sans doute trop personnel et flou pour le spectateur que nous sommes. Les états d’âmes des artistes nous sont étrangers, leurs angoisses et leurs doutes ne nous touchent donc pas. On reste en plein brouillard du début à la fin, et même le dossier en début d’album ne nous éclaire pas. Peut-être que le deuxième et dernier tome nous éclairera suffisamment pour apprécier à sa juste valeur cette série.

À défaut de ressentir l’histoire, nous avons tout le loisir de savourer le graphisme de l’auteur. Elle laisse s'exprimer tout son talent au travers d’un trait empli de sensualité et de chaleur pour un résultat envoûtant. En fonction de l’humeur de Noa, le dessin perd ses couleurs directes sablées pour ne laisser que le noir de l’encre, comme pour suspendre le temps. Enfin, l’album s’achève sur trois planches poétiques d’une rare beauté, une manière de nous inviter à découvrir la suite et de nous laisser à nos songes.

Allons bon, on en viendrait presque à oublier la relative inaccessibilité de l’histoire à trop contempler le dessin. Espérons que la suite nous permettra de concilier les deux plaisirs.

Moyenne des chroniqueurs
6.0