Les fantômes du Mont-Blanc Les Fantômes du Mont-Blanc

B ernie, un bouvier bernois, est confié à un vieil horloger demeurant à Saint-Gervais-les-Bains, au pied du Mont-Blanc, à proximité de la Talie et de la Swissland. Dès la première nuit, il sympathise avec le fantôme amnésique d'une femme à la recherche de son passé. En premier lieu, celui de sa famille déportée pendant la guerre, mais aussi le sien, alors qu'elle était amoureuse d'un jeune réparateur de montres.

Phicil ne manque pas d'ambition avec Les fantômes du Mont-Blanc, une chronique dramatique, historique, fantaisiste, fantastique, avec des accents surréalistes qui plairaient certainement à Fred. L’auteur déploie un univers hanté par des spectres, des géants et de mystérieuses créatures vivant dans les bois, l'une d'entre elles n'est d'ailleurs pas sans évoquer l'Ankou, une autre semble personnifier Baphomet (un homme à tête de chèvre). Bref, il convoque différentes figures du folklore européen. Tout cela avec en trame de fond un conflit suggérant la Deuxième Guerre mondiale, sans que cela soit dit explicitement. Il en va de même pour les pays dont les noms sont altérés. Cette distanciation apparaît étrange, sans véritablement déranger.

En apparence simple, le récit se révèle déconcertant du fait de ses nombreuses ruptures. Le lecteur se perd entre rêve et réalité, passé et présent. Mais, s’il persiste et se laisse porter par l’intrigue, il verra qu’à la fin, les morceaux se mettent tous en place et que l’ensemble se tient. La logique du scénariste est singulière, mais cohérente.

La fable repose sur un agréable dessin caricatural rappelant celui de Gregory Panaccione (Chronosquad). Les personnages se montrent très expressifs et les monstres n'ont finalement pas l'air si terrifiants ; chose certaine, ils le sont bien moins que les soldats arlomands pourchassent les fugitifs. Les décors, tant ceux de la montagne que les vieilles maisons en pierre sont également réussis. Dans ce copieux livre de cent-soixante-douze planches, l’artiste s’offre le luxe de laisser respirer ses illustrations, la plupart des pages n’accueillant pas plus que cinq ou six cases.

Une jolie histoire, portée par des motifs attrayants. Bien que le trait semble enfantin, particulièrement sur la couverture, ce n’est pas du tout un album jeunesse.

Moyenne des chroniqueurs
7.0