Phase finale 1. Desmodus Sapiens
E
n 2048, la Terre est entrée dans sa phase finale, celle de la disparition de l’humanité après des siècles d’action néfaste entraînant sa chute. Certaines mesures ont bien été prises, à l’image de l’arrêt total de l’exploitation des énergies fossiles… trop tard. Au beau milieu d’un monde en plein effondrement, l’essentiel de la société préfère détourner le regard et passer le plus clair de son temps dans le métavers. La chasse au clic et au like bat toujours son plein et Reggie Steambunk a décidé d’en faire son gagne-pain. Le youtubeur est sans cesse à la recherche d’un scoop ou d’une interview à sensation pour alimenter sa communauté (et donc remplir son frigo). Son rendez-vous du jour, Wallace 666, devrait lui rapporter gros. Ce survivaliste forcené est convaincu que l’état du monde est la conséquence de l’entrisme d’aliens, bien décidés à récupérer la planète pour eux lorsqu’elle sera devenue parfaitement invivable pour les humains.
Carcajou, Semper Feri, Bonjour vieillesse, et, donc, Phase finale. En 2024, pour El Diablo, les publications se suivent mais ne se ressemblent pas. Pour cette nouvelle série, l’auteur propose un premier tome efficace, ultra rythmé et assez déjanté. Sa principale originalité tient au fait qu’il mélange des ingrédients de science-fiction (un cadre futuriste, des aliens) et une histoire de vampires. Car aux côtés de Reggie et Wallace, un troisième personnage occupe une place centrale dès la couverture de l’album : la baronne Mirka Kovačević. Assoiffée de sang, cette dernière erre en secret depuis des siècles, meurtrie par le souvenir de l’exécution de son père adoptif il y a fort longtemps. Mettant en scène l’existence bien réelle d’extra-terrestres, l’intrigue trouve un bon équilibre entre aventure et humour. En somme, ce premier volet part dans tous les sens, sans pour autant se perdre (ni le lecteur avec) en chemin. Évitant que le résultat ne ressemble à une tribune politique, le scénariste aborde par ailleurs, avec un regard critique, des thématiques actuelles telles que l’inaction climatique, la dépendance aux technologies ou encore le complotisme. Pour ce dernier point, le postulat de départ est, en effet, assez proche d’une version revisitée de la théorie des reptiliens.
L’énergie du récit doit beaucoup au travail de Romain Baudy, qui livre des planches percutantes et au découpage dynamique. Le look des personnages est également à souligner. Après des recherches graphiques visiblement assez fournies (disponibles en partie dans le cahier en fin d’ouvrage), et des premiers jets parfois assez éloignés du choix final, le dessinateur a su traduire le caractère de chaque protagoniste dans son physique. C’est, tout particulièrement, le cas pour le trio atypique qui se forme rapidement.
Menée à cent à l’heure et accompagnée d’un chara design séduisant, Desmodus sapiens est assurément une bonne entrée en matière. Reste à transformer l’essai.
7.0