Le vivant à vif

S ujet majeur d’aujourd’hui et de demain, la crise environnementale que rencontre la planète devient chaque jour de plus en plus visible et prégnante. Changement climatique, chute de la biodiversité, stress hydrique, espèces envahissantes, épidémie, etc. les symptômes s’accumulent toujours et encore, même s’ils n’occupent les unes des journaux que pendant un court instant. En 2021, Bruno David faisait paraître À l'aube de la 6e extinction (Grasset), un essai où il proposait une synthèse des différentes connaissances du domaine, apportait plusieurs pistes de réflexions et même quelques solutions. Depuis, l'ancien directeur du Muséum national d'histoire naturelle a croisé Simon Hureau et, en plus d’une solide amitié, l’idée d’une version BD de son ouvrage s’est rapidement imposée.

Le vivant à vif n’est pas le seul album à saveur «écolo» sorti ces dernières années, loin de là. Que ce soit en fiction ou en mode documentaire, la liste et la diversité de l’offre est indéniable et souligne bien l’intérêt pour ces questions fondamentales. Dans cette adaptation, Hureau a choisi la forme de la leçon de choses en suivant Félicien et Salomé, des collégiens, dans leur recherche d’informations nécessaires à un devoir. Autant le dire tout de suite, au niveau des faits et des détails, les deux ados vont être plus que servis et le lecteur avec ! Accompagnés de spécialistes, ils ont droit à un «crash course» de haut niveau, mêlant biologie, chimie, géologie et écologie, sans oublier un peu d’économie et de sociologie au passage. Cent cinquante pages de connaissances pures sont au programme.

Le talent de dessinateur naturaliste de Simon Hureau n’est plus à démontrer et est bien connu depuis longtemps. Auteur à la sensibilité rare, il n’est pas une de ses histoires qui ne met pas de l’avant l’environnement, voire en fait l’axe principal. Dans ce sens, Le vivant à vif peut se lire comme une suite ou un approfondissement de L’oasis (Dargaud, 2020), récit dans lequel il racontait la renaissance écologique de son jardin. Dessins à l’aquarelle, finesse du trait, couleurs éclatantes, le résultat se montre à la hauteur des attentes. Par contre, même si le découpage s’avère efficace, il est impossible de ne pas regretter que les textes et les explications prennent souvent le dessus sur les illustrations. Comme dit précédemment, les sujets abordés sont vastes, passablement complexes et auraient peut-être demandé quelques pauses sous la forme de grandes compositions muettes ou purement descriptives. À défaut, n’hésitez pas à aller faire un petit tour dans les bois ou un parc public entre deux chapitres. Prendre le temps d’observer et de se reconnecter avec la nature fait d’ailleurs partie des recommandations préconisées par les auteurs.

Loin du simple manifeste militant, Le vivant à vif possède évidemment un côté cri du cœur ou pavé dans la mare de nos habitudes. Cependant, il s’agit avant tout d’un véritable livre de savoir qui expose des faits indéniables, met en exergue l’absurdité de nos modes de vie et, finalement, notre aveuglement volontaire. La Terre va mal, ça craque de partout et pourtant bien peu est entrepris pour limiter nos impacts sur la biosphère. À lire et à faire lire autour de soi.

Moyenne des chroniqueurs
7.0