Les brumes de Sapa

P rise entre une mère surprotectrice et un père célèbre luttant contre ses démons, Lolita ne sait pas quoi faire de sa vie. Tout lui paraît terne, pesant. Aussi, quand l’opportunité s’offre à elle, elle s’envole pour le Vietnam. Mais, ce voyage n’a guère à voir avec la révélation qu’attendait la jeune femme. Puis, en fin de séjour, elle visite Sapa, un village montagnard. Elle y rencontre Lo Thi Gom, une hmong qui la touche, inexplicablement. Une amitié étrange naît, au-delà de la distance et des errances de Lolita qui, en France ou au Québec, n’a qu’une envie : repartir et revoir cette adolescente.

Nouvelle édition enrichie d’un épilogue et d’une postface inédite, Les brumes de Sapa relate un pan de l’existence de Lolita Séchan : celles de ses années de recherche d’elle-même, d’un but et d’une rencontre fondamentale. À travers six chapitres, l’autrice revient avec lucidité et sensibilité sur un double voyage, au bout du monde et intérieur, éclairé par la naissance et la persistance d’une relation tissée au fil des ans, de la distance et d’échanges épars. À travers cette chronologie d’un lien amical, elle explore son désir de fuite et d’errance ainsi que la confrontation à une autre culture impliquant une ouverture du regard porté. Elle évoque aussi le poids de traditions ancestrales sur les possibilités d’avenir de son amie hmong qui reçoit, en parallèle, l’influence de la modernisation et des mutations de son pays. La difficile conciliation entre aspirations, rêves et réalités quotidiennes s’invite dans le propos. Ce dernier est porté par un dessin en noir et blanc au trait fin, proche du crayonné. Il s’en dégage une impression de fugacité, mais également une belle expressivité. Les planches s’agencent autour de bandes horizontales et de cases sans contours animées et aux décors travaillés. L’ensemble est globalement agréable et parvient à faire oublier les quelques longueurs narratives.

Invitant à se laisser porter par le fil d’une relation amicale nourrissant le rapport à la vie des deux femmes qui la partage, Les brumes de Sapa se lira à petites doses pour mieux être savouré.

Moyenne des chroniqueurs
6.0